Pierre Pestieau
Il n’y a pas que les hôtels que les robots peuvent envahir. Ils pourraient prochainement s’imposer dans les maisons de retraite. Suite au scandale de la maltraitance dans les Ehpad, d’aucuns ont trouvé la solution miracle dans un recours généralisé aux robots. L'expérience du Japon peut être particulièrement instructive, étant donné le déclin de sa population, la proportion croissante de personnes âgées et son aversion pour l'immigration à grande échelle, ainsi que ses prouesses technologiques dans de nombreux aspects de la robotique et de l'automatisation. Bien qu'il soit reconnu que les robots peuvent être un piètre substitut pour de nombreuses tâches exigeant de l'empathie et de la dextérité dans les professions de soins, le Japon a été l'un des premiers à adopter les robots pour répondre à la pénurie de personnel soignant par rapport à la demande croissante de services de soins de longue durée, y compris l'aide aux activités de base de la vie quotidienne telles que l'alimentation, la toilette et le bain.
Au Japon comme ailleurs, les projections prévoient une forte pénurie de travailleurs de soins dans les années à venir, en partie parce que ces travailleurs souffrent de divers maux, tels que des douleurs lombaires, tout en recevant des salaires dépassant à peine le salaire minimum. En réaction, le Japon a activement encouragé le développement et l'utilisation de robots dans les soins de longue durée.
Il existe peu d’études empiriques sur cette question. L’une d’entre elles aboutit à des résultats surprenants et instructifs. Dans un article récent (1), des chercheurs ont étudiés la relation entre l'adoption des robots et la dotation en personnel des maisons de retraite au Japon. Ils ont constaté que les maisons de retraite ayant adopté les robots avaient entre 3 et 8 % de personnel en plus que les autres. Les maisons de retraite équipées de robots semblaient également avoir une meilleure qualité de gestion et étaient mieux à même de réduire la charge de travail des soignants. Il apparait ainsi que les robots ne se substituent pas aux aidants mais leur facilitent la tâche et ce faisant, la rendent plus attractive.
(1). Karen Eggleston, Yong Suk Lee, Toshiaki Iizuka, Robots and labour in the service sector, Vox EU 2021. https://voxeu.org/article/robots-and-labour-service-sector.