Pierre Pestieau
« Les
économistes condamnent quasi unanimement le sophisme de l'emploi en quantité
fixe, un concept selon lequel le nombre total d'emplois dans une économie est
fixe et donc doit être partagé équitablement. (…) La thèse selon laquelle
réduire la durée du travail, avancer l'âge de la retraite, bloquer
l'immigration ou adopter des mesures protectionnistes créera des emplois pour
les autres n'a aucun fondement, ni théorique ni empirique. » (1)
Cette
citation de Jean Tirole, qui reçut en 2014 le prix Nobel en Sciences
Economiques, résume parfaitement le point de vue des économistes orthodoxes. Elle
implique un rejet sans équivoque de cette thèse que d’aucuns utilisent pour
préconiser l'avancement de l'âge du départ à la retraite (les seniors ne
prennent-ils pas le travail des jeunes ?). On retrouve aussi cette thèse chez
ceux qui soutiennent que les immigrants « prendraient » le travail
des résidents nationaux, au motif que cet emploi serait en quantité fixe. On
notera en passant que nous avons là un cas intéressant d’une thèse qui est
adoptée par les deux pôles extrêmes du spectre politique : la droite dure l’utilise
pour s’opposer à l’immigration et une partie de la gauche pour soutenir une
baisse de l’âge de la retraite.