jeudi 28 août 2014

Tunnels

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Désespérés comme nous l’étions par le monde, par la peur, par le sang, le seul refuge qui nous restait était la terre. Nous nous y sommes enterrés vivants
(Amir Nizar Zuabi, Haaretz).
 
Les Israéliens creusent des tunnels dans le ciel de Gaza et « leurs ‘héroïques’ pilotes se battent contre les plus faibles, les plus démunis qui n’ont ni force aérienne, ni même défense aérienne ; assis dans leur cockpit, les pilotes israéliens poussent sur des boutons et des joysticks et ne voient ni le blanc des yeux ni le sang de leurs victimes » écrit Gideon Levy éditorialiste du Haaretz (1).

Comme le ciel de Gaza n’appartient pas à ses habitants, ceux-ci ont bien été obligés d’inventer des tunnels dans les sous-sols. Mais comme l’écrit Amir Oren (2), « les tunnels doivent être enlevés quand ils sont encore petits ».

« Et pendant que j’écris ceci », continue-t-il « un dénommé Mohammed, alias Ahmed, est en train de creuser un tunnel de sa cuisine à Qalqilyah [situé dans les territoires occupés] en direction de la chambre à coucher de Mme Rosenberg demeurant à Kfar Sava [Etat d’Israël]. Elle a entendu forer, elle en est sûre. Non, non, ce n’étaient pas mes voisins… Quand elle arrive le soir chez elle et allume les lumières, elle est presque sûre de trouver Ahmed en train de l’attendre. 

L'économie de la Merditude

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Pierre Pestieau
Certains d’entre vous ont sans doute lu le roman à succès de Dimitri Verhulst au titre surprenant La Merditude des choses (1). Plus nombreux sont ceux qui ont vu le film qui en a été tiré et qui a eu un grand succès en Belgique comme en France (2). Le roman décrit surtout la jeunesse de l’auteur qui vit dans une maisonnée étonnante. La seule femme y était sa grand-mère, propriétaire du logis qui abritait aussi ses quatre fils adultes à commencer par le père de l’auteur, le facteur du village, qui a hérité de son propre père un alcoolisme à toute épreuve. C'est aussi le seul de la fratrie à occuper un emploi à temps plein, les autres naviguant entre petits boulots, délinquance et oisiveté à outrance. Dimitri vit donc avec son père et ses trois oncles chez sa grand-mère, une sainte femme qui fait leur lessive, les laisse boire sa maigre pension et nettoie le mobilier avant le passage de l'huissier. Les quatre frères et le jeune garçon passent l’essentiel de leur temps à écluser les bars de Reetveerdegem (village fictif situé non loin d’Alost) lors de beuveries épiques. Ils défendent à coups de poing l'honneur familial, organisent des Tours de France éthyliques ou des courses de vélo nudistes. 

jeudi 21 août 2014

Encore Piketty

2 commentaires:

Pierre Pestieau

Dans un éditorial du New York Times daté du 23 juillet 2014, intitulé : « Un guide des inégalités pour les nuls », Nicholas Kristof (1) revient sur le succès du livre de Thomas Piketty. Il note qu’une grande majorité de ceux qui ont acheté cet ouvrage de près de 685 pages (dans l’édition anglaise) ne sont pas allés au-delà des vingt-six premières. Pour ces lecteurs trop vite découragés, il propose un guide en 5 points sur les questions d’inégalités traitées par Piketty. Je les reprends ci-dessous.

Tout d'abord, l'inégalité des revenus et de la richesse a empiré de manière significative au Etats-Unis et dans certains autres pays. Le pourcent de la population le plus riche aux États-Unis possède maintenant plus de richesses que les 90 pour cent les plus pauvres. Oxfam estime que les 85 personnes les plus riches dans le monde possèdent autant de richesses que la moitié la plus pauvre. La situation pourrait être tolérable si tout le monde bénéficiait de la prospérité. En 2010, 93 pour cent des dividendes de la croissance sont allés vers le pour cent le plus riche.

A propos des propos attribués à Thomas Piketty (ter)

2 commentaires:

Victor Ginsburgh (*)

Je suis un de ceux qui ne sont pas arrivés plus loin que la page 26 de l’ouvrage de Piketty. Je dirais même mieux, je n’ai pas ouvert le livre, donc je suis arrivé à la page zéro et l’ai classé dans le rayon grossissant des livres non lus et que je ne lirai probablement jamais.

Pourquoi, me direz-vous, l’ai-je acheté ? Pour céder à la mode et faire comme tout le monde ? Parce que je suis optimiste et que je crois que reviendra, un jour, le temps des cerises ? Rien de tout cela. Je me le suis vu offrir, en espérant que celui qui me l’a offert ne lira pas ce que j’écris. Et aussi parce qu’il suffisait de lire un des milliers de résumés en deux pages tels que celui de Kristof dont vient de parler Pierre.

Voici tout de même quelques impressions qui ne contredisent sans doute guère ce que dit Piketty, mais qui tempèrent un peu l’enthousiasme que les Krugman et Stiglitz de ce monde ont développé pour l’ouvrage.

Sans pousser leur enthousiasme aussi loin, il faut reconnaître que Piketty a mis une question très intéressante sur le tapis, contrairement à beaucoup d’économistes qui sont plutôt excités par le « comment gagner encore plus en jouant mieux à acheter et vendre des titres ».

Mais on peut se poser la question du pourquoi la hausse de l’inégalité des revenus ou de la fortune est une mauvaise chose. Elle me rappelle les années Reagan et la fameuse courbe de l’économiste Laffer basée sur le fait qu’on en connaît deux points : en l’absence d’impôts, les recettes fiscaux sont nulles (point t0 sur l’axe horizontal et T = 0 sur l’axe vertical du
Courbe de Laffer
graphique)
; par contre si le taux d’impôts est de 100% (Tmax = 100), il n’y aura plus de recettes fiscales (T = 0), parce que toute activité économique aura cessé (point tmax dans le même graphique). Il doit donc exister un taux d’imposition intermédiaire t* qui est le meilleur possible au sens où il rend T maximum. Mais disaient en chœur Laffer, Reagan et la droite de l’époque, nous avons dépassé ce point t* et sommes déjà en t3, donc augmenter le taux de taxation ne peut que réduire la manne fiscale tandis qu’en diminuant le taux d’imposition, nous collecterons plus d’impôts. Cette courbe a fait l’objet de nombreuses critiques, parce que personne n’en connaît l’allure qui n’est sans doute pas aussi simple que celle représentée sur le graphique. L’idée n’est néanmoins pas complètement farfelue ; ce qui l’était c’est la localisation du point où les Républicains disaient que les Etats-Unis se trouvaient.