Pierre Pestieau
On ne peut pas ouvrir un journal ou un magazine sans y retrouver des statistiques dont le seul but est de frapper les consciences. Malheureusement, à force de nous sortir ces chiffres alarmants on ne réussit qu’à nous rendre insensibles aux problèmes qu’ils sont censés dramatiser. C’est ici que le bon sens peut jouer un certain rôle.
Tirés au hasard : Depuis le covid, 4 jeunes sur 10 souffrent de dépression. Le burnout touche plus d’un tiers des enseignants. Un enfant sur trois est pauvre. Alors que l’on vit de plus en plus longtemps, l’espérance de vie en bonne santé stagne à 65 ans tant pour les femmes que les hommes. Les 100 personnes les plus riches sur la planète possèdent plus que la moitié de la population la plus pauvre.
A cet égard, il est intéressant de demander au camarade Google les phénomènes qui correspondent à une personne sur 2, 3, …. et dont raffolent nos journaux. Voici quelques exemples pris au hasard :
1 personne sur deux sera atteinte du cancer au cours de sa vie
1 personne sur 3 dans le monde n’a pas accès à de l’eau salubre
1 personne sur 4 âgées de 15 ans ou plus dans l'Union européenne est un fumeur
1 personne sur 5 est touchée chaque année par un trouble psychique
1 adulte sur 6 dans l’UE est considéré obèse
Je pourrais multiplier ces exemples à l’envi, mais à quoi bon ? En réalité, la plupart de ces assertions ne sont pas toujours incorrectes mais le plus souvent trompeuses parce que reposant sur des définitions très particulières des problème traités. Prenons l’exemple de la pauvreté des enfants. Il faut savoir qu’elle correspond au nombre d’enfants issus de familles pauvres, à savoir de familles dont le revenu est inférieur à deux tiers du revenu médian ajusté pour la taille de la famille. Pour une famille avec trois enfants, le seuil de pauvreté qui en Belgique est d’environ 1300 euros pour une personne isolée passerait à plus de 3000 euros. En outre, cette mesure de pauvreté ne tient pas compte de ce que reçoivent financièrement et affectivement les enfants. Certains enfants de familles pauvres sont sans nul doute mieux traités que des enfants de familles plus aisées. En conclusion, pour avoir une connaissance informée du taux de pauvreté chez les enfants , il faudrait des indicateurs plus intelligents.
Quand on parle de burnout ou de dépression, on a tendance à mettre dans le même panier des pathologies légères et temporaires et les pathologies lourdes et débilitantes. Même remarque pour l’après covid. Il est important de ne pas confondre les inconforts passagers et mineurs avec le covid long qui peut paralyser une vie. Ici aussi des données précises sont importantes pour forcer les pouvoir publics à prendre les mesures appropriées.
Enfin quand on parle d’espérance de vie en bonne santé, il faut raison garder. En France, elle serait de 65 ans pour les hommes et les femmes alors que leur longévité est respectivement de 81 et 86 ans. Il n’est pas crédible d’affirmer que les Français et les Françaises aient en moyenne une fin de vie en mauvaise santé pendant 16 et 21 ans respectivement. Comment alors expliquer que les enquêtes sur le bonheur indiquent que c’est à 65 ans que l’on est le plus heureux. Il est donc important de ne pas confondre les petits bobos et les dépendances lourdes.
Pour conclure, rappelons la blague légèrement éculée : Vous êtes 5 dans une pièce. On sait qu’un homme sur 5 est chinois. Qui est le Chinois parmi vous ?
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