Pierre Pestieau
Il y a
quelques jours, j’ai eu la chance de faire la connaissance de Michel Rocard qui
donnait une conférence sur les difficultés de réformer l’Etat providence et
particulièrement le système des retraites. Il fut en 1991 l’auteur d’un livre
blanc sur les retraites acclamé à l’époque. Rappelons son propos de l’époque,
lorsqu’il présenta son livre : « La retraite est un dossier ‘explosif’ capable de faire chuter plusieurs
gouvernements ». Je l’ai trouvé plus clair comme conférencier que
dans les interviews et certainement différent de l’image d’un professeur nimbus
incompréhensible que les imitateurs français ont donnée de lui. Il avait en
outre l’élégance de reconnaître qu’il n’était pas l’auteur du livre blanc, que
l’on devait à des économistes de feu le Commissariat au Plan.
S'il est
un sujet sensible et difficile à traiter, c'est bien celui des retraites. En
cela la Belgique et la France sont semblables. La différence est qu’en France
des gouvernements sont déjà tombés sur cet écueil, alors que les Belges ont
évités d’en arriver là. Les cyniques diront qu’en Belgique nous avons eu bien
d’autres prétextes pour faire chuter un gouvernement. Au fil des ans, les
enquêtes ont montré que les Français comme les Belges ont pris acte des
difficultés structurelles de leur système de retraites ainsi que du besoin de
le réformer. Tout à la fois on trouve toujours une très forte réticence à accepter les mesures qui sont
censées faire partie de la réforme dès lors qu’elles mettent en cause ne fût-ce
que minimalement le bien-être de tout un chacun.
En Belgique, deux ministres, un flamand et un francophone, Alexander De Croo et Sabine Laruelle ont mis en place il y a un plus d’un an
une ‘Commission pour la réforme des
pensions 2020-2040’. Composée de douze experts qui sont incontestablement
compétents et complémentaires, cette commission a pour mission d’examiner
quelles réformes spécifiques contribueraient à garantir l’efficacité ainsi que
la durabilité sociale et financière des régimes de pensions belges à moyen et à
long terme. Au printemps 2014, c’est à dire maintenant, la commission devait
remettre un rapport dans lequel elle formulerait des recommandations de
politique concrètes. Il semblerait que le gouvernement qui n’est pas plus
téméraire que ses prédécesseurs ait préféré reporter la diffusion de ce rapport
après les élections du 25 mai souvent qualifiées de pleines de dangers.
En France comme en Belgique, il y a urgence pour
qu’une réforme sérieuse soit entreprise au plus vite. Les conséquences du statu
quo sont claires. La dette publique, explicite et implicite ne cesse d’augmenter,
luxe que ni l’un ni l’autre pays ne peut s’accorder. Et pourtant rien ne change
vraiment. Nous vivons comme cette famille qui habite une maison dont la
charpente est dévorée par des termites ; elle risque de s’effondrer si on
ne lui applique pas le traitement adéquat et plus on attend plus les dégâts
seront importants et les réparations coûteuses. Mais tout à la fois, on peut
continuer de vivre comme si rien n’était.
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