Victor Ginsburgh
Bruxelles : Quelque 6.000 firmes, cabinets d’avocats et autres et
30.000 lobbyistes qui exercent une pression considérable pour que les
réglementations de la Commission et du Parlement Européen (1) leur soient
favorables.
Leur rôle est rendu un peu plus difficile qu’aux Etats-Unis parce que le
système européen ne permet pas aux entreprises de faire des « dons »
généreux aux élus et de « soutenir » leurs campagnes électorales, ce
qui exclut (en tout cas officiellement) une certaine forme de corruption
permise Outre-Atlantique. Mais ceci est largement compensé par la non-existence
en Europe de certaines règles éthiques minimales, en permettant à des fonctionnaires
d’utiliser leurs connexions dans les administrations publiques le lendemain du
jour où ils les quittent.
Ceci semble être le cas d’un certain Jean De Ruyt, ancien diplomate belge,
qui a gravi les plus hauts échelons dans le saint des saints de l’Union
Européenne. Ce personnage est maintenant conseiller dans le cabinet d’avocats
américains Convington & Burling spécialisé dans le lobbying. M. van Velzen,
ex membre du Parlement Européen (1994-2004) et ex Président du groupe politique
le plus important (les chrétiens démocrates) de ce même Parlement de 1999 à
2004 est un collègue de M. De Ruyt. Le premier sert de relais entre Covington
et le Parlement Européen, le second se concentre sur les membres du Conseil Européen
qu’il connaît très bien. On peut y inclure Hugo Paemen, un baronisé belge,
ancien ambassadeur de l’U. E. aux
Etats-Unis. Et bien d’autres gros et moins gros poissons…
Ajoutons que ces cabinets d’avocats s’arrangent pour garder secret le nom
des firmes pour lesquelles ils agissent, ce qui ne leur est pas permis aux Etats-Unis
et rend plus difficile encore de comprendre le processus.
Pour le moment, le cabinet Covington s’agite pour que soient adoptées les
vues des grands groupes pétroliers dans le règlement européen sur la
fracturation hydraulique (fracking), cette technique « merveilleuse »
qui permet d’extraire du gaz naturel dans les couches de schiste. Covington aurait
aussi réussi à affaiblir un règlement européen permettant aux fonds de pension
d’investir une partie de leurs avoirs dans des actions émises par des firmes
privées.
Parmi les autres faits d’armes, le cabinet Hogan Lovells a obtenu qu’une
firme américaine de semi-conducteurs obtienne une exemption aux lois
environnementales européennes, ce qui leur a permis de continuer à utiliser une
substance potentiellement dangereuse dans leurs composants d’ordinateurs. Le
groupe Philips admet que la combinaison avocats plus « conseillers »
de Hogan Lovells est exactement ce dont il a besoin. « Bien sûr »,
avoue Philips, « il nous faut des avocats, mais il nous faut surtout des
personnalités importantes qui puissent peser sur les décisions de
régulation ».
Et à M. De Ruyt de surenchérir en expliquant que « c’est très excitant
d’obtenir ce que l’on veut en utilisant le système. Et je sais exactement
comment le faire ».
(1) La plupart des
renseignements contenus dans ce blog sont basés sur l’article d’Eric Lipton et
Danny Hakim, Lobbying bonanza as firms try to influence European Union, The New York Times, October 18, 2013 http://www.nytimes.com/2013/10/19/world/europe/lobbying-bonanza-as-firms-try-to-influence-european-union.html?_r=0
Mr. Victor, usted está poniendo el dedo en la llaga más sensible de nuestro sistema político. Siga hurgando, por favor, para que la opinión pública se entere de cómo se cruzan los cables en la toma de grandes decisiones. Cordial saludo. Bernardo García.
RépondreSupprimerMerci M. Ginsburgh pour cette mise au point de la réalité des lobbies au parlement européen. Il n'est pas toujours possible pour le citoyen lambda de s'informer à bonne source.
RépondreSupprimerCher Pr. Ginsburgh,
RépondreSupprimercertes, le systeme de l'EU est de plus en plus pourris, mais je me sens fort impuissant face a ce systeme. Le vote ne sert a rien dans la particratie. On en vient a esperer un sauveur, qui vienne d une autre parti. Les sirenes de l'extreme droite sont de plus en plus tentantes car elles répondent a ce degout de la corruption de l'EU.
De plus, les medias de moins en moins financer sont a la botte de pouvoir et votre article ne parait pas non plus dans les journaux a grande diffusion.
Que faire?