Victor Ginsburgh
A Pierre J.
Durant l’ère victorienne en Angleterre, la barbe était prescrite par les
médecins pour raisons de santé. A Londres, elle était supposée filtrer le
mauvais air chargé de particules engendrées par le chauffage au charbon utilisé
à l’époque, qui provoquait de longs épisodes discontinus de smog pouvant atteindre
quatre mois (novembre à mars) comme en 1897-1880 (1).
Bactérie de barbe |
Ce qui ne peut que me réjouir. En effet, je me porte très bien malgré les
particules de gasoil dont on nous a caché l’existence pendant plus de 50 ans,
grâce à ma barbe à la Serge G. Ben quoi, c’est un cousin très lointain auquel je
ne ressemble pas, et je ne chante pas aussi bien que lui. Sinon, je ne serais évidemment
pas devenu économiste.
Mais il y a aussi des risques importants pour la santé, dus, notamment, aux
miettes qui s’accumulent dans la barbe et qui attirent évidemment des tas de
bactéries plus horribles les unes que les autres en tout cas quand on les
regarde au microscope. Sans compter les poux que l’on peut voir à l’œil nu et
les puces qui sautent.
Les uns disent que la barbe, c’est à la mode, les autres disent que c’est
le résultat de la sélection darwinienne. Le deuxième argument est évidemment beaucoup
plus sérieux. Quand il y a trop de barbus, les femmes font « beurk »
et se tournent vers les visages glabres. C’est ce que montre une expérience
très sérieuse, décrite dans Biology
Letters (2), et dans laquelle les expérimentateurs montrent, à des sujettes
et à des sujets, des faciès divers en manipulant la proportion de barbus et de
non barbus. Les femmes (et les hommes aussi, d’ailleurs) préfèrent les barbus
quand ils sont peu nombreux et les glabres quand il y a trop de barbus. Pour le
moment ça va, on continue à me regarder (mais souvent de travers). Il ne faut
donc pas croire qu’on est sexy quand on porte la barbe, ni quand on ne la porte
pas. Tout ça dépend du nombre de ceux qui vous imitent. S’il y en a trop de
l’une ou de l’autre espèce, vous êtes fichu quoi que vous fassiez et quel que
soit votre âge.
Marx déguisé en Darwin |
Il y a même un nom pour ceux qui ont peur des barbes : ils sont
pogonophobes, de barbe en grec ancien bien sûr et de "fobos" comme n’importe quelle phobie. Marx et Engels
avaient des barbes et ont fait très peur à un tas de monde, mais je ne suis
jamais allé visiter un psychiatre pour me débarrasser de cette phobie. Il y en
a suffisamment d’autres pour lesquelles il faut le faire, et j’ai déjà payé.
A noter que Freud lui-même était barbu et ne s’est jamais plaint, pas de
cela en tout cas. Ni Barberousse, ni les Femmes à Barbe, et encore moins Barbe
Bleue. Et certainement pas Conchita Wurst, ni Karl M. Piketty (qui ne la porte
pas). Ni bien sûr Pierre J.
(1) The Smithsonian Magazine, May
18, 2014. http://www.smithsonianmag.com/smart-news/victorian-era-doctors-prescribed-beards-help-keep-men-healthy-180951471/
(2) Z.
Jannif, R. Brooks and B. Dixson, Negative frequency-dependent preferences and
variation in male facial hair, Biology
Letters 10 (2014), April 14, 2014
j'aimerais voir Victor sans barbe pour émettre un commentaire objectif, peut-être que si la Belgique gagne la coupe du monde....
RépondreSupprimerDanièle M