Victor Ginsburgh et Pierre Pestieau
Hélas, ce n’est pas fini, mais voici deux articles du New York Times qui décrivent les ruines de Gaza.
375.000 habitations à restaurer dont 80.000 à reconstruire (*)
« La reconstruction de toutes les maisons détruites par l'offensive militaire israélienne dans la bande de Gaza pourrait prendre jusqu'au siècle prochain si le rythme de reconstruction devait correspondre à ce qu'il était après les guerres de 2014 et 2021, selon un rapport des Nations unies publié jeudi.
« Citant des données du Bureau central palestinien des statistiques, le rapport de l'ONU indique qu'au 15 avril, quelque 370 000 maisons sont endommagées, et 79 000 de ces dernières sont détruites. Il faudrait 80 ans si ces habitations étaient reconstruites au même rythme que celui des deux guerres précédentes (projections du rapport du Programme des Nations Unies pour le développement et de la Commission économique et sociale des Nations Unies pour l'Asie occidentale).
« Cette projection ne tient pas compte du temps qu'il faudrait pour réparer les centaines de milliers de maisons qui ont été endommagées mais pas détruites. »
37 millions de tonnes de débris à déblayer (**)
« La guerre d'Israël à Gaza a créé 37 millions de tonnes de débris (dont 800.000 tonnes d’asbeste et 7.500 tonnes de bombes non explosées, sans compter 10.000 corps), qui pourraient prendre plus d'une décennie à enlever, a déclaré un haut responsable du déminage de l'ONU.
« Près de sept mois après le début de la guerre, il y a en moyenne 300 kg de décombres par mètre carré de terrain a déclaré Pehr Lodhammar, l'ancien chef du Service national de lutte contre les mines pour l'Irak.
« Sur la base de la quantité actuelle de débris à Gaza, avec 100 camions, nous parlons de 14 ans de travail... pour enlever les débris (Lodhammar).
« Déblayer et reconstruire sera un travail lent et dangereux en raison de la menace des obus, des missiles ou d'autres armes enterrées dans des bâtiments effondrés ou endommagés. En moyenne, environ 10 pourcent des armes n'ont pas explosé lorsqu'elles ont été tirées et ont dû être retirées par des équipes de déminage (Lodhammar). »
Ces deux articles ne traitent que d’une partie des coûts de cette guerre. Il faudrait y ajouter la perte de revenus de l’ensemble des Gazaouis depuis plus de dix-huit mois et surtout les morts et les blessés. Malheureusement, les économistes ne sont pas bien équipés pour évaluer ces pertes humaines. Dans un blog d’il y a quelques années, l’un d’entre nous (***) avait discuté de l’évaluation des coûts de la guerre en Syrie pour la période 2010-2016 en y incorporant les pertes de vie et les souffrances encourues. Mais ici on entre dans le domaine du non-mesurable, de ce qui n’a pas de prix.
Pas de prix sans doute mais dans notre monde marchand tout a un prix. Les morts du 11 septembre 2001 entre les Tours Jumelles de New York se sont vus attribuer un prix, celui de l’indemnité accordée par l’état et les compagnies d’assurance, prix qui dépend du revenu qu’ils touchaient. Là est le problème. Dans un pays pauvre comme l’est la Syrie, les revenus sont faibles et du fait que l’évaluation de la valeur de la vie est liée au revenu, le coût de la guerre en termes de perte des vies humaines était faible (****). Le même raisonnement appliqué à la Palestine aboutirait sûrement à la même conclusion. Cela explique sans doute l’indifférence quasi générale des pays riches à l’égard de la souffrance des Syriens hier et des Palestiniens aujourd’hui.
Oui, le concept de "prix" de la vie humaine se réfère à la disponibilité à payer, concept à partir duquel on obtient un prix qui s'applique à tous. On parle de la valeur statistique d'une vie humaine. Cependant, les chiffres obtenus par différentes analyses diffèrent largement.
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