Victor Ginsburgh
Dans son dernier article du New York
Times, En finir avec les saignées hellènes (1), Paul Krugman compare aux
médecins du Moyen-Age qui insistaient pour pratiquer des saignées à leur
patients, les technocrates européens au chevet de (ou en train d’achever)
l’Hellade. Lorsque le traitement aggravait leur état de santé, il suffisait d’augmenter
les saignées.
Sont à son chevet le médecin en chef Donald Tusk, Président du Conseil de
l’Europe : « La situation est critique et malheureusement nous ne
pouvons pas exclure le scénario noir de la mort ». A quoi répond l’autre
médecin en chef, Jean-Claude Junker, président de la Commission Européenne,
« nous avons un scénario de Hexit dans nos cartons. Je ne puis l’éviter si
le gouvernement hellénique ne fait pas ce qu’on attend de lui par respect de la
dignité de son peuple ». Il y a aussi une médecine en chef, la sœur Angel(in)a qui
propose d’augmenter d’une unité par jour le nombre de saignées : « il ne
reste que trois jours pour discuter de futur ». Matteo Renzi, Premier
ministre italien opine du bonnet en ajoutant qu’on ne sait plus quelle réunion
des 28 « leaders » de l’Union Européenne « pourrait bien être la
dernière » pour achever le malade. A quoi, Janis Reirs, ministre des
finances et medicine man de la Lettonie (?) répond en estimant que la « sortie
de l’Hellade pourrait être positive pour la zone euro ». Les propositions
du malade, c’est-à-dire celles qui augmenteront sa maladie « doivent être
crédibles » constate l’incrédible François H., Président de la douce France.
Ils sont tous d’accord, il faut augmenter les saignées.
Devant la porte de la chambre du malade que remplissent pour le moment ces médecins
qui font partie de l’élite de la nation Europe, se pressent pour prendre le
pouls du malade : le médecin en chef Mario Draghi, Président de la Banque
Centrale Européenne, la mère supérieure Christine Lagaillarde, directeure générale
du FMI, dont les prédécesseurs ont déjà sur la conscience plusieurs pays
africains traités avec des doses trop fortes d’austéritéprine, mais qui a
récemment estimé qu’il fallait aussi restructurer la dette hellène, ainsi que
le Charles Michel, Premier Ministre de Belgique qui n’a rien à dire, et Guy Verfostadt,
Député Européen qui s’est soudain mis à éructer. Tous deux essaient néanmoins de
pousser les autres pour être les premiers à entrer. Et puis (2),
Tsipras
vint à son tour et dit:
J'ai
souvenance
Qu'en un pré de moines passant,
La faim, l'occasion, l'herbe tendre, et je pense
Quelque diable aussi me poussant,
Je tondis de ce pré la largeur de ma langue.
(Bon,
disons deux fois la largeur, je l’admets)
Je n'en avais nul droit, puisqu'il faut parler net.
A ces mots on cria haro sur le baudet.
Une louve quelque peu teutonne prouva par sa
harangue
Qu'il fallait dévouer ce maudit animal,
Ce pelé, ce galeux, d'où venait tout leur mal.
Sa peccadille fut jugée un cas pendable.
Manger l'herbe d'autrui ! quel crime abominable !
Rien que la mort n'était capable
D'expier son forfait : on le lui fit bien voir.
Selon que vous serez puissant ou misérable,
Les jugements imbéciles vous rendront blanc ou
noir.
« Et je vêtirai avec fierté la haine des
créanciers » (3), des mots tragiques qu’Eschyle aurait pu prononcer aussi.
(1) Paul Krugman, Ending Greece’s bleeding, New York Times, July 5, 2015.
(2) Presque La Fontaine, Les animaux malades de la peste.
(3) Yannis Varoufakis.
La première partie de ce texte a paru hier dans L’Echo.
Presque mieux que La Fontaine! ça coule de source, comme on dit!
RépondreSupprimerMais au fait, c'est quoi qui coule? croule ou s'écroule? un rêve de Jean Monnet face aux gens de monnaie?
(PS: au FMI, c'est la garde, pas la gaillarde ou bien tu as fait exprès, ou tu as mélangé avec celui à qui elle a succédé!)
"Faut qu'ça saigne ! Demain ce sera ton tour !"
RépondreSupprimerhttp://www.youtube.com/watch?v=nNvyjJUgKss
AU moins la medecine a fait des progres!Pour l'economie...je suis moins sur
RépondreSupprimer