Pierre Pestieau
Cette
phrase évoque un épisode de la vie de César qui fut contraint de répudier sa femme
suite à une rumeur d’infidélité qui ne fut jamais avérée.
Elle
est ressortie des rayons tout récemment à propos de l’affaire Thevenoud, ce nouveau
ministre de Manuel Valls qui dut démissionner après quelques jours pour rumeur
de fraude fiscale. La presse de droite comme de gauche prise d’une frénésie anti-Hollande,
ce qu’on appelle plus élégamment le Hollande bashing, fit ses titres gras de ce
nouvel avatar.
Après
analyse, il semblerait que ce députe dynamique du PS avait simplement été
négligent ; il n’avait pas envoyé sa déclaration fiscale dans les délais
et avait, de ce fait, été soumis à une amende de retard dont il s’était
acquittée à deux reprises. De la sorte, il a contribue plus qu’il ne le devait
au budget de l’Etat. Beaucoup de contribuables pratiquent ce type d’oubli qui
parfois peut être parfaitement rationnel. Les économistes du comportement
étudient depuis plusieurs années ces situations de procrastination qui affectent
de nombreux individus. Les uns procrastinent devant le fisc, d’autres dans le règlement
de leurs factures ou le respect
d’un plan d’épargne. A première vue, c’est totalement irrationnel ; il suffirait
de presque rien pour éviter une amende mais précisément ce presque rien peut
nous paraître énorme comme si l’on était sur une planète dont la pesanteur
ferait qu’un litre d’eau pesât une tonne. Dans le cas de Thevenoud on a parle
de phobie administrative pour en rire ou pour la trouver anormale. Les éditeurs
de revues scientifiques savent que la majorité des rapporteurs qui s’engagent à
remettre leurs commentaires dans les 3 mois souffrent de phobie éditoriale. Ce
qui entraîne de nombreux rappels, sans conséquences pour eux.
L’affaire
Thevenoud rappelle une autre affaire, celle de l’avoir fiscal (1), qui causa la
perte de Jacques Chaban Delmas, ce fringuant premier ministre de George
Pompidou. On lui reprocha de n’avoir pas payé d’impôt une année en bénéficiant
d’une règle qui permettait d’éviter l’impôt si l’on avait subi des pertes en
capital supérieures à ses revenus. C’était parfaitement légal. Mais la
symbolique d’un impôt nul pour un candidat a la présidence (Pompidou était mort
avant la fin de son mandat) lui fut fatale. La France eut Giscard.
Dans
ces deux affaires, les quelques analystes qui avaient compris que rien d’illégal
n’avait été commis, ont néanmoins approuvé la curée qui a amené la démission du
ministre et celle de sa femme et le retrait de la vie politique nationale qu’a
subi Chaban. Et ce au nom de l’exemplarité. César se doit d’être irréprochable
et cet impératif s’étend à sa famille. Mais
il faut se méfier des parangons de vertu qui jouent les censeurs. Ils ont
parfois un côté obscur à la manière d’un Tartuffe.
A propos de Tartuffe,
j’ai une petite anecdote. Il y a
une quinzaine d’années j’ai eu le privilège diner avec quelques autres
en face du PDG d’une grosse société d’assurance. La conversation allait bon
train quand soudainement notre hôte d’honneur s’est enflammé pour dénoncer la
fraude à l’assurance et la timidité des pouvoir publics pour lutter contre ce
fléau. Quelques semaines plus tard, il était inculpé pour
détournement de fonds.
(1) L'avoir fiscal correspond au montant
qu'un actionnaire, peut déduire de ses impôts (IRPP ou IS). Il correspond à une partie (actuellement
50%) des dividendes perçus pendant l'année. La logique de
l'avoir fiscal est de ne pas imposer en totalité les dividendes versés par les
sociétés, ces dernières ayant déjà payé un impôt sur les bénéfices.
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