Pierre Pestieau
Jeudi 5 novembre. Deux articles parmi ceux que je parcours
rapidement dans
les journaux me font sursauter. Le Soir
publie un article qui annonce dans son titre « Les taux de fécondité européens chutent.
La Belgique est touchée, mais la Flandre se redresse ». Et d’ajouter
« La meilleure forme de l’économie flamande couplée à la régionalisation récente de la politique familiale ne sont
sans doute pas étrangères au meilleur taux de fécondité de la Flandre ».
Le New York Times lui consacre un de
ses articles éditoriaux à une communication de deux économistes de Princeton, Anne Case et Angus Deaton, qui vient de recevoir le
prix Nobel d'économie (1). Leur communication porte
sur l’augmentation rapide des taux de mortalité des Américains blancs non qualifiés
et d’âge mur (midlife). Ce serait là un fait
nouveau qui contraste avec l’augmentation continue de la longévité dans les autres groupes d’âge, dans les autres
groupes raciaux et ethniques, et dans les autres pays. Bref une désolante spécificité
américaine. Les auteurs observent que cette hausse surprenante des taux de
décès s’expliquerait non pas par les facteurs traditionnels que sont les maladies
cardiaques et le diabète, mais par une épidémie de suicides et de maladies
découlant de la toxicomanie (cirrhoses du foie, surdoses d'héroïne et prescription
d’opioïdes).
Pourquoi réagir ?
L’article du Soir
présente le phénomène comme étant tout récent alors que les données sur lequel il
s’appuie datent au mieux de 2013. Plus important, il y a l’explication : la fécondité
serait liée aux conditions économiques et aux politiques familiales. Les démographes
nous expliquent depuis la nuit des temps que rien n’est plus difficile que
d’expliquer la fécondité. La France connaît une véritable stagnation économique
et une réduction de la générosité de ses politiques familiales. Elle reste
pourtant en tête des pays européens pour sa fécondité. L’article du New York Times nous apprend une nouvelle que l’on connaît depuis de
nombreuses années. Il y a deux ans j’ai même consacré un
blog à cette tragédie soulignant qu’on ne lui trouvait pas d’explication
convaincante. Je faisais alors écho à une série d’articles (2) signalant qu’aux
Etats Unis les femmes blanches sans formation connaissaient un taux de
mortalité supérieur de 66% à la moyenne nationale. Leur longévité avait
dramatiquement baissé au cours des dix dernières années (2). Case et Deaton apportent une explication mais elle me
semble partielle. Comme pour la fécondité, la mortalité s’explique par les
conditions sociologiques et psychologiques des personnes concernées. Quand on a
dit cela, on a tout dit et rien dit a la fois.
(2) http://www.mintpressnews.com/why-are-uneducated-white-women-dying-sooner/168378/ and http://www.medicaldaily.com/uneducated-white-women-us-have-66-higher-mortality-rate-246356
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