Victor Ginsburgh
Comme on pouvait s’y attendre aucun problème n’est réglé. Les banques
restent TBTF (too big to fail), la régulation n’a rien changé.
La Banque Centrale américaine (Fed) et la Federal Deposit Insurance
Corporation (FDIC), les deux institutions censées superviser les banques, annoncent
que 5 des 8 plus grandes banques américaines « n’ont aucun plan crédible
pour éviter la panique en cas de crise (1) » et que « la régulation
des grandes banques est devenue une course contre la montre ; les
régulateurs sont bien trop lents pour imposer les régulations financières
imposées aux banques il y a six ans (2) ».
Les cinq banques visées (Bank of America, Bank of New York Mellon, JP
Morgan Chase, State Street et Wells Fargo) dont les plans ont été rejetés, ont
90 jours pour les réviser « mais dans leur indulgence, les régulateurs
leur ont donné 6 mois de plus, ce qui vient en supplément des 2 ans qui leurs
avaient déjà été donnés » pour se mettre en ordre. Une autre banque, la
Citygroup, a s’est vue attribuer un « passable » par les deux
institutions (Fed et FDIC), alors que Goldman Sachs et Morgan Stanley un
« passable » d’un seul des deux régulateurs. Ce qui n’a aucunement
empêché les valeurs des actions de ces banques d’augmenter le jour même de
l’annonce (13 avril), ce qui montre que le monde financier se fout des avis des
régulateurs, parce qu’il n’y croit pas ou plus.
Ce qui ne fait que s’ajouter à l’avis de Mervyn King, ex gouverneur de la
Banque d’Angleterre (de 2003 à 2013) qui « pointe l’impuissance croissante
des banques centrales » et qui ajoute dans son interview au Monde que « nous ne savons pas d’où
elle viendra, mais une nouvelle crise financière est probable (3) ». Les
déséquilibres entre pays qui étaient déjà discutés avant la crise de 2008, se
sont accentués et Mervin King de proposer de revenir aux taux de changes
flexibles, ce qui est évidemment impossible en Europe en tout cas, tant que
l’Euro nous dirige.
Une des solutions au problème de la zone Euro, ajoute Mervyn King, serait
de mettre en place un gouvernement économique centralisé, « mais cette option
n’a pas le soutien du peuple. Comment imaginer qu’un électeur espagnol soit
prêt à appuyer un groupe de bureaucrates non élus à Bruxelles pour décider des
dépenses budgétaires ».
Et des bureaucrates non élus, y’en a un gros paquet.
Pour la petite histoire, je viens de lire sur Le Soir (4) qu’un certain Monsieur Claude Marx, dont le nom est
évidemment prédestiné, et qui est le « gendarme de la finance
luxembourgeoise » a, dans le temps, « entretenu des liens étroits
avec Mossack Fonseca et le monde offshore ». On me rétorquera qu’il n’y a
pas de meilleur policier qu’un ancien voleur. Mais quand même…
Tout ceci dans une ambiance de liesse, où, avant-hier, a commencé le procès
contre celui qui a dévoilé les procédure des tax rulings utilisées au
Luxembourg (le LuxLeaks) ; où on apprend que la banque Dexia a continué
ses affaires louches avec le Panama pendant que nous étions en train de payer
pour la sauver de la catastrophe ; où nous attendons avec patience la
prochaine crise grecque qui s’annonce et pour laquelle « les ministres de
la zone Euro visent un accord jeudi », c’est-à-dire aujourd’hui (5). Ouvrez
l’œil et les oreilles. Vous aller voir et entendre.
(1) N. Popper and P. Eavis,
Regulators warn 5 top banks they are still to big to fail, The New York Times, April 13, 2016.
(2) Banks still too big to
regulate, The New York Times, April
14, 2016.
(3) Eric Albert, Le cri d’alarme
d’un ancien banquier central, Le Monde,
30 mars 2016.
(4) Joël Matriche, Le gendarme
de la finance luxembourgeoise est lui aussi dans les Panama Papers, Le Soir, 26 avril 2016.
(5) Dette grecque : les
ministres de la zone euro visent un accord jeudi, Le Point, 22 avril 2016.
Merci Victor,
RépondreSupprimerJe continue à croire aux vertus du capitalisme et de la libre entreprise. Mais pas quand les leviers de commandes sont aux mains d'escrocs et de gens déloyaux qui ne pensent qu'à très court terme et à leurs intérêts. N'y a-t-il plus d'acte gratuit ni de morale dans le monde actuel ? Les égoïsmes individuels et stupides dominent.
Toujours un plaisir de te lire.
Amitiés
Pierre