Pierre Pestieau
La performance de
l’Etat providence peut être envisagée de deux façons. Soit on met l’accent sur
sa capacité à protéger les citoyens contre les risques de la vie et
particulièrement celui de la pauvreté; soit on insiste sur l’effet qu’il peut
avoir sur la compétitivité de nos économies et partant sur la croissance et
l’emploi.
On peut mesurer
la performance de l’Etat providence à
partir de la manière dont il remplit les objectifs qui lui sont naturellement
assignés, à savoir la protection des citoyens contre des risques tels que le
chômage ou la maladie, et la réduction des inégalités et de la précarité. Sur
base d’indicateurs portant sur l’emploi, le revenu, la santé et l‘éducation il
apparaît que la performance des Etats providence européens s’est améliorée au
cours des deux dernières décennies et que celle de la France se situe dans une
bonne moyenne. Rien ne garantit cependant que cette évolution favorable
continue.
Quant à l’effet
des politiques sociales sur la compétitivité, il est difficile de le mesurer empiriquement,
les facteurs explicatifs de la compétitivité étant nombreux et complexes. Sur
le long terme, ces politiques semblent avoir eu une influence positive sur la
croissance des économies européennes. Ces dernières années, du fait de la crise
et du chômage, le rôle bénéfique de l’Etat providence a été remis en question. En fait ce n’est pas tant l’Etat providence
mais plutôt ses disfonctionnements qui semblent faire problème. Un Etat
providence efficace devrait continuer à favoriser la compétitivité de nos économies.
Cela réclame de réformer son organisation et son financement pour le faire mieux
réagir aux évolutions économiques et sociétales.
Quatre critiques
sont généralement formulées à l’encontre de l’Etat providence. D’abord, à force
d’être surprotégés par les diverses formes de protection sociale, les individus
perdraient leur capacité à se débrouiller; plus encore, leurs préférences et
leurs valeurs auraient changé progressivement. Ensuite, les taux de
prélèvements imposés par le financement de l’Etat providence auraient un effet
désincitatif sur le travail, l’investissement et le commerce extérieur. En
outre, il serait à la fois inefficace dans son utilisation des ressources
publiques et dans ses objectifs redistributifs. Enfin, dans sa forme actuelle, il
serait inadapté aux nouvelles formes du marché du travail et plus
particulièrement à ce que l’on appelle l’ubérisation de notre économie.
Il me semble
important de rencontrer ces critiques afin de rendre à l’Etat providence sa
capacité à soutenir et non pas freiner la croissance. C’est possible mais cela
demande un courage certain de la part des responsables politiques et une prise
de conscience proactive de l’ensemble des citoyens.
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