Pierre Pestieau
Plus jamais ça ! Chiche
On n’a pas encore atteint le pic de
la pandémie et le bout du tunnel est peut-être encore loin, mais nombreux sont
déjà les beaux esprits qui glosent à propos de ce qui se passera une fois tournée
la page de la pandémie. On entend des propos qui rappellent le « plus
jamais ça » qui à suivi la seconde guerre mondiale et la découverte du
génocide. On parle de changement de paradigme, de révolution des comportements,
de l’apparition d’un homme nouveau. Or on sait ce qui est advenu des bonnes
résolutions de l’après-guerre. On a connu d’autres génocides et certains pays
sont victimes de la peste brune (1).
Le livre noir du covid-19
Il est bien sûr impossible de dire à
combien s’élèvera le tribut que nous devrons payer au covid-19. A ce jour on dénombre
quelque 120.000 morts (2). Il est intéressant de contraster ce chiffre avec
celui que l’on attribue au
changement climatique, qui lui s’élève à plusieurs millions. Or la réaction des
gouvernements et celle de la population à l’urgence climatique est beaucoup
plus passive que ce qu’on observe aujourd’hui, face à l’urgence pandémique.
Pourquoi cette différence ? Sans doute est-elle due au fait que chacun se
sent menacé par le covid-19 alors qu’il croit pouvoir échapper aux risques du
changement climatique.
On peut
espérer que la relance de l’économie, qui sera indispensable une fois la
pandémie terminée, ne se fera pas au détriment de l’environnement comme ce fut le
cas après la crise de 2008. Les plans massifs de soutien à l’activité économique avaient conduit à une forte hausse des émissions de
CO2. Il faut souhaiter que
cette fois-ci les politiques de relance puissent contribuer à la transition énergétique.
Économie de guerre
Partout on entend des critiques
sévères des systèmes de santé belge et français. On leur reproche leur imprévoyance.
L’ex-ministre de la santé en France, Roselyne Bachelot, a été vertement moquée
pour avoir commandé,
en juillet 2009, 94 millions de vaccins afin de faire face à la pandémie
annoncée de grippe H1N1. Cette grippe s’est finalement révélée moins grave que
prévu. Les Français n’ont été que 6 millions à se faire vacciner, ce qui
laissait le pays avec un stock de 88 millions sur les bras, ou plutôt sur ceux
de l’État français. Aujourd’hui, elle a beau jeu de se pavaner avec un
« j’avais raison avant l’heure » qui ne tient pas la route.
On notera
que les pays qui ont réussi à maîtriser la pandémie du covid-19 ne sont pas
connus pour avoir un système de santé performant et généreux, certainement
moins que ne le sont les systèmes de santé belge et français. En d’autres
termes il faut distinguer le système de santé en temps de « paix » et
la capacité d’un pays à faire face à une pandémie. Comme les exemples
asiatiques le révèlent, cette capacité repose sur un pouvoir autoritaire et un
esprit civique. Après le confinement, on ne pourra éviter de réformer notre
système de santé et développer des outils qui permettent de réagir plus
rapidement et plus efficacement aux risques inassurables, dont le covid-19 est
un parfait exemple.
(1). Surnom donné pendant la Seconde Guerre mondiale au nazisme par
analogie à la couleur des chemises des SS.
(2). Plus exactement 123.783 selon le site https://www.worldometers.info/coronavirus/ le 14
avril à 19h.
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