dimanche 12 avril 2015

La voiture de société, une double aberration

Pierre Pestieau

Je viens de passer 3 semaines à Osaka, ou plus précisément dans la banlieue qui s’appelle Toyonaka et qui abrite l’un des campus de l’Université d’Osaka. Ce qui m’a frappé c’est que les participants aux séminaires et colloques auxquels j’ai assisté venaient tous en transports en commun. Ils venaient pourtant parfois de loin, de Kobe, de Kyoto. Ils devaient prendre plusieurs correspondances mais me disaient-ils le train est plus rapide, plus confortable et moins cher que la voiture individuelle. J’ai pris moi-même ces trains et je suis impressionné par leur fréquence, leur ponctualité, leur propreté et la qualité des informations annoncées par haut-parleur ou affichées sur des panneaux digitaux (en  anglais et bien sûr en japonais).


Par comparaison, j’ai la nette impression qu’une portion non négligeable d’universitaires belges prennent leur voiture individuelle pour assister aux mêmes types de réunion avec toujours la même excuse : plus rapide, plus confortable même si plus cher surtout s’il s’agit des ainés qui bénéficient d’un tarif préférentiel assez choquant dans les trains, mais c’est une autre histoire. Et pourtant nous ne sommes pas dans le monde des affaires petites ou grandes. Car dans ce monde sévit un mal qui répand la terreur, mal que le Ciel en sa fureur inventa pour punir un fisc pourtant désargenté et frapper un environnement déjà si délabré : la voiture de société (puisqu'il faut l’appeler par son nom).
Tout le monde a entendu parler des voitures de société mais certainement pas les Japonais pourtant fabricants de nombreuses voitures. Lorsque je leur expliquais le phénomène, ils n’en croyaient pas leurs oreilles.

Rappelons la double aberration que représente la voiture de société. Une aberration économique et environnementale. En effet c’est d’abord une façon inefficace d’éviter l’impôt. On sait que la meilleure fiscalité est celle qui élimine toutes les niches fiscales et la voiture de société en est une. En outre tout étudiant en première année d’économie sait qu’un cadeau en espèces est quasiment tout le temps préférable à un cadeau en nature. En effet de nombreux utilisateurs de voitures de société auraient préféré une voiture plus modeste ou une prime leur permettant d’utiliser les transports en commun.

Dans son récent rapport sur la Belgique, l’OCDE (1) plaide ouvertement pour l’accroissement de la fiscalité sur la consommation d’énergie à usage résidentiel, et surtout pour la réduction des déplacements en voiture particulière entre le domicile et le lieu de travail. Première cible, les voitures de société. Les voitures de société sont un sujet qui revient également régulièrement sur la table. Le système d’imposition a déjà été réformé il y a deux ans avec peu d’effet. Tout au plus a-t-il amené les flottes des sociétés à être composées de voitures de calibre plus modeste, moins polluantes.
Les Belges passent en moyenne 53,2 minutes par jour dans les transports, affirme une étude Samsung (2). C'est plus que dans n'importe quel autre pays européen, dont les citoyens passent, en moyenne, 45 minutes par jour dans les transports. Cet exploit s'explique en partie par l'usage majoritaire de la voiture, moyen de transport favori de deux travailleurs sur trois, avec pour conséquence des embouteillages interminables et des nivaux de pollution insupportables. Or une proportion importante de ces voitures sont des voitures de société.

Alors que tout le monde parle de tax shift, pourquoi ne pas mettre le changement de vitesse (en anglais shift) des voitures de société sur le point mort ?

1 commentaire:

  1. J'espère que vous avez aimé votre voyage au Japon. Je ne sais pas pourquoi mais il y a toujours les nouvelles technologies là-bas. J'aimerais voir l'une de ses voitures de société.
    Yvon Lebras | http://www.silencieuxgosselin.ca/

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