Victor Ginsburgh
Les économistes racontent beaucoup de bêtises. Une partie de celles-ci est
due à la méconnaissance de ce qui se rapprochera peut-être un jour d’une
science. J’ai déjà entendu beaucoup de sottises, mais celles qui sont
rapportées dans un article publié par L’Echo
du ** septembre 2017 par XY qui se dit économiste et anthropologue, sont un chef-d’œuvre
à nul autre pareil.
Cet économiste-anthropologue se demande comment on peut gérer le risque
financier et pose, naturellement, comme question « est-ce que les
économistes ont une bonne réponse ». Je pensais qu’il utiliserait des
arguments anthropologiques, politiques, sociologiques, voire, économiques pour
expliquer ce qu’il en est. Non, en toute prudence, parce qu’il pense ainsi être
scientifique, il se retranche derrière des arguments faisant parti de la
physique théorique, qui est elle-même à la recherche d’une cohérence entre
physique relativiste et physique quantique.
Voici les arguments de XY suivis de mes réactions.
(a) « La science économique
suppose qu’[on peut gérer le risque]. C’est même le fondement d’un de ses
piliers, la théorie des anticipations rationnelles, qui suppose qu’une
connaissance parfaite du présent permet une connaissance parfaite de l’avenir,
une conception laplacienne du monde, démentie au début du 20ème siècle par la
mécanique quantique et par la théorie du chaos ensuite ».
Monsieur XY n’a pas compris que l’hypothèse d’anticipations rationnelles au
sens large. Elle dit simplement que les agents économiques peuvent, sur base de
leur expérience passée, « deviner » un peu du futur, et en
particulier, ne pas se laisser surprendre par la façon dont les autorités
publiques pourraient réagir devant un événement. Ce qui enlève toute
« surprise », parce que les agents s’y sont préparés et que les
actions (notamment keynésiennes mais autres aussi) ont beaucoup moins
d’effet le jour où elles sont prises. Elles ont été « anticipées de façon
rationnelle ». Le rôle du gouvernement (et des banques centrales) se
trouve donc sérieusement limité. Rien à voir avec la « mécanique quantique
ou la théorie du chaos ».
(b) « D’autres piliers de la science économique ont également été
démentis par la physique. Ainsi la possibilité même d’un système économique à
l’équilibre, impossible à réaliser du fait que l’économie est un système
dissipatif captant l’énergie de l’extérieur et soumis à l’entropie, à la
déstructuration inéluctable ».
Monsieur XY n’a pas davantage compris que les économistes savent très bien
qu’un système n’est jamais à l’équilibre, mais le modèle théorique permet
d’étudier ce que seraient les propriétés si l’on pouvait être à l’équilibre et
donc, en principe, si l’on n’en est pas très éloigné. Rien à voir
avec « l’entropie et la déstructuration inéluctable ».
(c) « Une conclusion s’impose [dès lors] : l’évaluation correcte
du risque financier ne sera possible que lorsque nous aurons appris à penser
les théories économiques, financières, politiques et sociales comme un seul
ensemble ».
Monsieur XY devrait ajouter à ses plumes d’économiste et d’anthropologue
celle de physicien. Au moins il ne maltraiterait pas la physique. Tout en
appelant la physique à son secours, avec des arguments pas très convaincants,
il conclut que l’évaluation correcte du risque financier pourrait être
appréhendée si « les théories économiques, financières, politiques et
sociales pouvaient être considérées comme un ensemble ». Il ne convie donc pas à la surprise-party
ceux dont il dit qu’ils pourraient résoudre tous les problèmes rencontrés en
économie : les physiciens eux-mêmes.
Consacrez-vos talents à l’anthropologie qui donne une vue bien intéressante
de la société, cher Monsieur XY, nous avons assez de sots parmi les économistes,
n’en rajoutez pas un de plus.
mais qui est donc ce mystérieux mr XY??
RépondreSupprimerPourquoi est-ce que l'oncle Paul est presente comme etant un Economiste? Fort decevant de la part de L'Echo et "du Monde".
RépondreSupprimerCedric
Physicien et Economiste
Cela me rappelle mon cours de philosophie de l'économie qui invoquait le concept (remontée) d'entropie sociale ans une définition de la calorie sociale. Idem pour le degré adiabatique, etc, etc ... La compartimentalisation des savoirs est peut-être un obstacle à l'étude des phénomènes sociaux mais un peu de méthode évite les confusions et les concordismes hâtifs.
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