Pierre Pestieau
Le blog dithyrambique que Victor a consacré à Uber
(Uber
ueber alles) m’a légèrement titillé. Aussi ai-je lu avec intérêt dans la presse
française que le sénat menaçait ce type d’activités de taxation et autres règlementations
(1). Il y a plusieurs années que
j’entends à gauche et à droite, plutôt à droite, chanter les vertus de ce qui
s’appelle l’économie du partage ou économie collaborative. Uber par ci, Airbnb
par là, sans parler du Bon Coin. Tous ces sites sur lesquels on peut échanger
des biens ou des services, et qui sont rarement déclarés et encore moins imposés.
C’est merveilleux. Cela casse le pouvoir monopolistique d’industries protégées,
cela rend des services à des prix jusqu’alors prohibitifs et maintenant accessibles
à tous. Bref tout le monde y gagne sauf…l’Etat qui souffre d’un sérieux manque à
gagner et certains usagers qui peuvent en être exclus arbitrairement.
Ce qui caractérise l’économie de partage et que l’on
retrouve dans d’autres activités telles que le bénévolat, le travail
domestique, les chèques emplois services, c’est de se situer entre les activités
formelles qui sont répertoriées par le comptable national et soumises à la fiscalité
et les activités souterraines qui enfreignent la loi ou en tout cas évitent l’impôt.
C’est ce que j’appellerais des activités grises. Elles sont parfois légitimées
par le souci de lutter contre la fraude et le travail au noir. C’est le cas des
chèques services. Ou par le souci de rogner les rentes de situations de
monopoles, c’est le cas d’Uber. Ou par le besoin d’utiliser ce gisement sans
prix que représentent l’altruisme et la charité, c’est le cas du bénévolat. Y arrivent-elles ?
On ne le saura que si on les étudie proprement. En attendant, je me borne à ne
pas trop vite croire les panégyriques dont elles bénéficient dans la presse.
Quand j’écrivais que beaucoup se réjouissent de l’émergence
de l’économie de partage, je dois nuancer mon propos. Ce n’est que dans certains
milieux que ce type d’activités est populaire. Je doute que dans mon village
natal on parle beaucoup d’Airbnb, du Bon Coin, de BlaBlaCar ou d’Uber.
Que l’on me comprenne bien. Loin de moi l'idée de
défendre l’industrie des taxis. Sarkozy et Hollande ont essayé timidement de
casser leur monopole en début de mandat. L’un et l’autre ont du reculer devant
la réaction violente des chauffeurs de taxi appuyés par une partie de la
population. De même, il m’arrive souvent de trouver les hôtels très chers. Une
chambre moins confortable que celle du motel de Psycho à plus de 150 euros
dans le voisinage de Louvain la Neuve, ça se trouve sans mal. Je reconnais que
l’obligation de service universel à laquelle les taxis et les l’industrie hôtelière
sont astreints et que les garanties qu’ils sont censés donner aux usagers
peuvent poser problème. Je n’en reste pas moins prudent quand je vois les
alternatives qui nous sont offertes.
(1) Le
Figaro, 18 sept. 2015, p. 22.
Bref, pas de liberté sans égalité (devant l'impôt) et fraternité ( partage) .
RépondreSupprimerQuel est le bon "mix" ?