Pierre Pestieau
Un chiffre publié dans l’Obs du 16 juillet : +5%, le “petfood”
en plein boom. On y apprend ainsi que
l’alimentation pour animaux de compagnie ne connait pas la crise; aux
Etats-Unis ses ventes représentent quatre fois le marché de l’alimentation
infantile. Le marché mondial atteint 90 milliards de dollars US. Selon les
estimations du Programme Alimentaire Mondial, il ne faudrait que 3,2 milliards de dollars US par an
pour nourrir les 66 millions d’enfants en âge d'aller à l'école qui ont faim
(1).
On me renverra
immanquablement au cliché « Comparaison n’est pas raison ». En effet
ces enfants mal nourris se trouvent en Afrique et en Asie alors que les animaux
domestiques habitent l’Amérique du Nord et l’Europe.
Il y a plusieurs années
j’ai lu le joli roman d’Antonio Tabucchi Nocturne indien (titre original : Notturno indiano) paru en français aux éditions
Christian Bourgois en 1987. A un certain moment,
le narrateur qui réside dans un hôtel luxueux à un moment de chaleur
caniculaire observe que pour en alimenter la climatisation, on doit rationner
l’hôpital public voisin. Et de décrire les conséquences de ce rationnement sur
la santé des milliers de patients qui passent (ou trépassent) par cet hôpital.
Dans la même veine il y a ces
milliers de terrains de golf que l’on trouve dans des régions où l’eau est un
luxe et une nécessité. Je prendrai pour seul exemple celui de l’Afrique du Sud
(2) où on recense plus de 700 terrains de golf ; en moyenne un terrain
consomme 350 000 litres d’eau par an. Dans un pays où de nombreux ménages n’ont
pas accès à l’eau courante, un seul terrain de golf utilise une quantité d’eau qui
permettrait de satisfaire les besoins de base de 1 200 personnes.
Ce ne sont là que trois
exemples d’indignation ; il en existe de nombreux autres qui touchent à l’environnement,
aux inégalités sociales et culturelles, au racisme et à la xénophobie. Le plus
souvent nous avons des indignations sélectives. Elles sont d’autant plus virulentes
qu’elles ne compromettent pas notre confort quotidien. Beaucoup d’entre nous se
révoltent aujourd’hui contre le traitement qui est fait à la nouvelle
génération de boat people qui sont souvent des truck people. Ils sont scandalisés
par les propos indignes de tel ou tel homme politique qui pratique la politique
du Nimby (3). Seront-ils toujours aussi indignés le
jour où la tragédie des refugiés entamera leur portefeuille ou dérangera leur
environnement immédiat ?
(3) Nimby est l'acronyme de
l'expression « Not In My BackYard
», qui signifie « pas dans mon arrière-cour ».
Excellent article, Papa.
RépondreSupprimerCe que tu racontes semble tellement évident qu'on se demande comment les politiciens n'en tiennent pas compte: les terrains de golfs en Afrique du Sud, ça paraît loin, mais dans le sud de la France il y en a autant et ça ne trouble pas grand monde. Il me semble qu'il manque à nos politiques une analyse globale de la situation écologique, à laquelle nous-autres des sciences sociales devraient être consultés: surtout toi Pierre!
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