Pierre Pestieau
Quelle ne fut ma surprise de découvrir dans les journaux
que l’homme le plus âgé du monde était Manuel Garcia
Hernandez qui serait né dans le nord du Mexique le 24 décembre 1896. Il serait
donc dans sa 122ème année. Si son âge venait à se confirmer, ce Mexicain
ravirait ce titre de la personne la plus âgée au Japonais Masazo Nonaka d’un
peu plus de huit ans son cadet. Il serait prêt à ravir le record de longévité à la Française Jeanne Calment, morte en
1997 à 122 ans et 164 jours. On sait que dans le domaine de la longévité, il y
a eu de nombreuses fraudes. Les plus célèbres concernent la Géorgie,
l’Altiplano et l’île d’Okinawa qui pendant longtemps semblaient fournir des centenaires
à la douzaine avant que cela ne soit prouvé faux. Même le titre de Jeanne
Calment a été contesté ; la rumeur voudrait que sa fille ait pris sa
place.
Si les tendances démographiques actuelles se prolongent, le nombre de centenaires en France pourrait atteindre 270 000 en 2070, soit presque treize fois plus que les 21 000 recensés au 1er janvier 2016, chiffre qui était déjà près de vingt fois supérieur à celui de 1970, d’après une récente étude de l’Insee (1). Comparé à l’ensemble de la population, leur nombre resterait modeste, à 0,4 % contre 0,03 % aujourd’hui.
En quoi cette explosion démographique nous intéresse-elle ? Dans les différents
articles consacrés à ces ultra-centenaires, on apprend qu’ils vivent heureux,
se permettent certains excès, un cigare le soir pour l’un, un verre de porto
pour l’autre. Il demeure qu’ils sont souvent condamnés à voir partir leurs
amis, leurs enfants et se retrouvent seuls. On se souvient de ce conte où une personne
méritante avait pu faire un vœu, celui de l’immortalité, et au bout d’un
certain temps suppliait qu’on la laisse mourir. Elle se retrouvait tragiquement
seule (2).
La longévité peut s’accroître de deux manières : soit la courbe de
survie devient de plus en plus rectangulaire, ce qui implique que vivons tous
un peu plus longtemps ; soit, elle a tendance à s’allonger vers la droite,
ce qui veut dire qu’une minorité connaît une vie plus longue. Il existe un débat
toujours ouvert sur cette question qui porte sur la plus ou moins forte régularisation
de la courbe de survie. Une forte augmentation du nombre de centenaires semble
indiquer que la rectangularisation de la courbe de survie connaîtrait un temps
d’arrêt et que la courbe de survie se déplacerait vers la droite.
Les
journaux ont récemment rapporté une autre nouvelle, celle-là inquiétante, sur
l’évolution de la longévité (3). Aux Etats Unis, la longévité stagnerait et
serait même décroissante et la longévité en bonne santé serait plus faible que
celle des Chinois. En effet, un bébé chinois peut espérer vivre
68,7 ans en bonne santé, contre 68,5 ans pour un Américain ; en revanche
ce même bébé vivra jusqu'à 78,5 ans aux Etats-Unis ne vivra que 76,4 ans en
Chine. Ce n’est semble-t-il qu’une question de temps. Partis comme ils le sont
les Chinois auront bientôt leur million de centenaires et le doyen de l’humanité
sera chinois.
(2) Lire aussi la nouvelle de
Jorge Luis Borges « L’immortel » publiée dans le recueil de nouvelles
L'Aleph, Gallimard 1977
(3) https://www.lemonde.fr/journalelectronique/donnees/protege/20180601/html/1317291.html
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