Pierre Pestieau
Dans un récent article (1), l’économiste américain Dani
Rodrik étudie l’émergence des mouvements populistes en Europe et en Amérique.
L’argument central de son article est que la mondialisation dans son stade
avancé se prête à une réaction populiste, lequel peut prendre différentes
formes selon les fractures sociales que les politiciens peuvent utiliser en
exploitant les courants anti-establishment. Par stade avancé de la
globalisation, qu’il appelle hypermondialisation, il veut dire que les gains
d’efficacité ne réussissent pas à compenser les pertes redistributives. On
trouvera du populisme de gauche là où l’impact de la globalisation se manifeste
dans les domaines de la finance, du commerce et de l’investissement
international. En revanche, le populisme de droite apparaîtra là où la
globalisation se traduit par de l’immigration
et particulièrement l’afflux de réfugiés.
Rodrik observe que le
populisme est déjà apparu lors de la première vague de mondialisation durant la
seconde moitié du 19ème siècle, qui elle aussi a connu un stade
avancé.
Selon lui, lors de la
campagne présidentielle américaine, les facteurs favorisant l’un et l’autre
populisme se seraient retrouvés aux Etats Unis : un populisme de droite
avec Donald Trump et un populisme de gauche avec Bernie Sanders. En Amérique
Latine, on aurait surtout du populisme de gauche et en Europe du populisme de
droite, à l’exception des mouvements de gauche Syriza et Podemos.
Rodrik est un économiste brillant et son
article en témoigne. Trois points me gênent dans son argumentation. D’abord, et
beaucoup d’études l’ont montré, le populisme s’explique
par de nombreux facteurs qui vont bien au delà de l’immigration ou des pertes
d’emploi liées aux délocalisations
industrielles. Ensuite, il adopte une objectivité factice qui consiste à
traiter sur le même pied les mouvements xénophobes d’extrême droite et les
mouvements qui contestent la sociale démocratie. Le Pen et Mélenchon,
« blanc bonnet et bonnet blanc » (2), comme aurait dit Jacques Duclos, c’est un
peut court. Finalement, il me semble naïf et prétentieux de
couvrir deux continents, l’Europe et l’Amérique aux histoires et institutions
tellement différentes.
(1) Dani Rodrik, Populism and the
economics of globalization, John F. Kennedy School of Government Harvard
University 2017
(2) Cette phrase a été
prononcée par le candidat communiste Jacques Duclos en 1969 au sujet de Georges
Pompidou et Alain Poher qui s’affrontaient au second tour de l’élection
présidentielle.
Pierre, si tu fais un blind test a partir des programmes économiques de Mélenchon et Le Pen je ne suis pas sur que tu t'y retrouves. C'est sensiblement la meme chose.
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