jeudi 19 décembre 2013

Evaluer l’inévaluable : la performance de l’enseignement universitaire

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Pierre Pestieau
MIT: le temple du sçavoir

Même si tout le monde s’accorde à critiquer la méthodologie qu’ils utilisent les classements universitaires internationaux de l’université Jiao Tong de Shanghai et de la revue Times Higher Education donnent une tête de peloton qui fait l’unanimité. Il est difficile de mettre en doute l’attribution des premières loges  à des institutions comme Harvard, MIT, Berkeley ou Oxford. Pour rappel, le tout dernier quinté gagnant de Shanghai était, dans l’ordre, Harvard, Stanford, Berkeley, MIT et Cambridge Angleterre et celui du Times, CALTECH, Harvard, Oxford, Stanford et MIT. La recherche qui y est menée est excellente; leur influence dans le débat des idées est incontestable et leurs étudiants n’ont aucune difficulté à trouver un emploi. Bref le rêve pour toute institution universitaire. Que la vieille Europe soit systématiquement absente des premières loges est incompréhensible pour certains et frustrant pour d’autres.


Immanquablement se pose la question de l’évaluation de l’enseignement, universitaire en l’occurrence. Est-ce possible et si oui comment? Dès l’abord, une première remarque. Les deux  classements précités sont utiles pour indiquer les grandes tendances mais dès que l’on entre dans le détail, ils ne sont guère informatifs. La manière dont les universités belges sont classées ne permet pas d’éclairer le décideur public. Le premier défaut de ces classements est leur niveau d’agrégation. Il vaudrait mieux procéder par disciplines, quitte à agréger en final les résultats des évaluations sectorielles.

mercredi 18 décembre 2013

Impressions en trois dimensions

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Victor Ginsburgh
 
Après le cinéma 3-D, ce sont les imprimantes 3-D qui font fureur, avec des bonheurs et des malheurs variés.

Le bonheur d’abord, la brosse à dents qui nettoie vos dents en six secondes, alors que moi je mets six minutes par jour, et encore, je passe quatre fois par an au détartrage qui me coûte chaque fois € 80 et qui n’est remboursé qu’une fois par an. Ce détartrage est rehaussé de menaces de mon dentiste qui me prédit des implants ou un dentier d’ici quelques années. Il me rassure cependant en m’expliquant que le dentier est remboursé, à l’inverse des implants qui coûtent évidemment dix fois plus cher.

jeudi 12 décembre 2013

L’écrit et l’iPad

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Victor Ginsburgh

MerdRe, comme disait si bien Ubu Roi, il y a quelques mois, on m’a averti (pas personnellement bien sûr) que l’abonnement de trois ans que je venais de souscrire à Newsweek ne sera pas honoré, et que mon hebdomadaire (presque) favori sera remplacé par du virtuel servi sur un iPad que je ne possède évidemment pas. Je suis donc un vieux consommateur baisRé, avec le même R qu’Ubu prononçait si bien.

Il se fait que, par hasard, j’ai aussi lu que le Secrétaire d’Etat américain à l’Education, un certain Arne Duncan, s’est récemment prononcé pour que les écoles américaines remplacent le plus rapidement possible les manuels scolaires que vous et moi avons connus par des manuels digitaux (1). Et la raison donnée est magnifique : La Corée du Sud, qui fait mieux que les Etats-Unis sur le plan de l’enseignement (2), adopte l’enseignement digital, donc si un bon enseignement adopte le digital, c’est que le digital est meilleur que celui qui utilise le papier. Encore quelqu’un qui ne comprend pas la différence entre corrélation et causalité. Mais un Ministre de l’Education Nationale ne peut pas avoir tort, donc il a raison.

mardi 10 décembre 2013

Australie. Si lointaine et si proche

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Pierre Pestieau

Je viens de faire un séjour de plus de trois semaines en Australie et j’aimerais livrer quelques réflexions sur ce voyage. A la fois, j’ai mauvaise conscience de faire des commentaires qui pourraient paraître désobligeants pour des personnes hypersensibles. Après tout, j’ai été accueilli par des gens charmants  et il n’est pas séant de déblatérer à leur sujet à peine repris le chemin du retour.

Ma première impression est que les Australiens se sentent beaucoup moins isolés qu’ils ne l’étaient il y a un demi siècle et même il y a une dizaine d’années, lors d’un premier séjour. Les moyens de transport sont moins chers et nettement plus rapides mais surtout ils sentent que le centre de gravité du monde se déplace et se rapproche d’eux. Leur politique migratoire et culturelle est davantage tournée vers l’Asie.

mardi 3 décembre 2013

A quoi ca sert?

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Pierre Pestieau

Récemment, Angus Deaton un des spécialistes de l’économie du développement a publié un livre intitulé La grande évasion en référence au film éponyme (1). Ce livre porte sur les progrès qu’ont connus les sociétés contemporaines en termes de réduction de la pauvreté et d’allongement de la durée de vie. Dans un chapitre excentrique, Deaton traite de l’aide au
pays en développement pour la dénoncer et en recommander la suppression. Inutile de dire que c’est la partie de son livre que de nombreux medias ont retenue. Ce n’est pas la première fois que l’on assiste à ce type de recommandations extrêmes. Tel remède ne donne pas les résultats escomptés, supprimons-le. Il y a près de 50 ans, Deaton et moi avions 20 ans, Ivan Illich sortait ses deux ouvrages fameux sur l’école  et la médecine (2). Il montrait avec beaucoup de subtilité que la plupart des dépenses de santé ne servaient quasiment à rien; de même, de nombreux investissements dans l’éducation n’avaient que peu d’utilité. Et bien, supprimons l’école et les systèmes de santé.

dimanche 1 décembre 2013

Changements climatiques et violence

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Victor Ginsburgh

On a bien trop peu parlé dans la presse d’une étude qui s’est intéressée à l’influence des changements climatiques sur la violence et les conflits et qui a paru dans la rubrique « surprising science » sur le site web de la Smithsonian Institution. La radio belge quant à elle, a interviewé un « sçavant » (du style des Femmes Sçavantes de Molière) qui expliquait que tout cela était connu des « sçavants » depuis bien longtemps.

Bien sûr, on a souvent parlé des conséquences du changement climatique sur la montée des mers ou la désertification qui engendrent des migrations, des réductions de terres arables, et des augmentations de prix des aliments. Mais ce n’est pas ce dont il s’agit ici.

Voici ce qui a été écrit à ce sujet dans deux articles récents publiés dans Science (1) et dans Nature (2). Les auteurs des deux études ont procédé à un examen (que l’on qualifie de méta-étude) de quelque 60 articles et livres scientifiques sur la question. Ces études convergent vers le même résultat, à savoir que quelle que soit la région du monde et l’époque (et ils remontent à 10 000 ans avant notre ère), le changement climatique est non seulement corrélé à la violence, aux conflits et à l’instabilité politique, mais est aussi une cause (pas la seule) de ces phénomènes, y compris entre 1950 et aujourd’hui.

vendredi 29 novembre 2013

J’admire comme on peut mentir en mettant la raison de son côté (1)

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Victor Ginsburgh

Voici quelques exemples de « grands » personnages que nous devons tous admirer pour leur pouvoir de mentir en mettant la raison de leur côté. Mais le ridicule ne tue plus.
 
A tout seigneur, tout honneur. George W. Bush parlant devant un auditoire de 1.200 personnes en octobre 2013 (2) explique : «  Je ne croirai pas aux intentions pacifiques de l’Iran jusqu’au moment où les Iraniens les prouveront ». Applaudissements nourris des invités ! Amusant pour quelqu’un qui avait prouvé qu’il y avait des armes de destruction massive en Irak.

A cette même occasion, Bush a longuement expliqué que les Etats-Unis étaient enclins à s’isoler, et qu’il faudrait rappeler à Obama que le pays dont il est le Président devrait soutenir davantage la paix et la démocratie. Ce monsieur qui ose utiliser le mot « paix » prête non pas à sourire mais à fourire

Où sont les économistes francophones ?

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Pierre Pestieau

Le congrès des économistes belges de langue française (1) qui vient d’avoir lieu, portait sur l’Etat social belge. Je préfère quant à moi le terme d’Etat providence. Au moment où il a fallu trouver des orateurs pour la session plénière et pour la Commission portant sur les inégalités dont j’avais la charge, on s’est aperçu qu’il n’y avait pas de spécialistes de l’Etat providence en Belgique francophone. Les noms qui revenaient étaient ceux de collègues flamands tels que Frank van den Broek, Erik Schokkaert et Bea Cantillon, sans parler des nombreux jeunes chercheurs qui travaillent avec eux à Anvers et à Leuven. C’est d’ailleurs eux que nous avons invités. Cela peut s’expliquer à mon sens mais c’est inquiétant quand on pense que c’est en Francophonie et non en Flandre que l’Etat
providence connaît et connaîtra de graves difficultés du fait de la régionalisation en marche et d’un taux d’emploi désespérément bas.

Comment expliquer cette pauvreté de la réflexion sur l'Etat providence chez les Belges francophones, qui en ont pourtant tant besoin? Il y a au moins 3 raisons:

(a) L'étroitesse de la société francophone: à peine 4 millions de personnes, dont certaines ont le regard sans cesse tourne vers la France.

(b) Nos meilleurs économistes sont des théoriciens davantage tournés vers l'étranger, le monde anglo-saxon qui fait les réputations.

jeudi 21 novembre 2013

Les bonnes intentions I

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Pierre Pestieau

Bilinguisme aux Etats-Unis
Ces derniers temps, je me suis aperçu que certaines politiques apparemment souhaitables peuvent avoir des effets pervers inattendus : il n’y a pas que l’intention qui compte. Deux exemples. La parité dans les études universitaires et le bilinguisme anglais espagnol qui règne dans plusieurs parties des Etats Unis.

Dans une étude récente, Borjas, un des meilleurs spécialistes de l’immigration, montre que les immigrants américains connaissent des évolutions salariales beaucoup moins favorables aujourd’hui qu’il y a plusieurs décennies (1). Ce serait particulièrement vrai des immigrants d’origine latino-américaine et une des raisons invoquées semble être le bilinguisme anglais espagnol. Du fait de ce bilinguisme, il est possible de vivre sans apprendre l’anglais, ce qui peut être un handicap professionnel.

Les bonnes intentions II

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Victor Ginsburgh

Enfin une décision intéressante du gouvernement wallon (1): Les grandes surfaces seront livrées durant la nuit pour réduire les embouteillages dans les villes durant la journée. Il en faudra bien plus pour les éviter, et je suggère d’étendre cette sage décision aux circonstances suivantes.


(a) Il est évident que les camions à remorques qui traversent (avec grandes difficultés) nos rues devraient se promener la nuit. 

(b) Sans parler des immenses grues et camions de déménagement.

(c) Et du ramassage des poubelles qui devrait être fait à l'aube. C’est déjà comme ça à New York. J’ai l’ai vécu, et je me suis réveillé en me demandant si on déménageait l’immeuble ou plus simplement mon lit, mais je suis toujours là, donc ce n’était ni l’un ni l’autre.

jeudi 14 novembre 2013

Groupes de pression et Commission Européenne

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Victor Ginsburgh

Bruxelles : Quelque 6.000 firmes, cabinets d’avocats et autres et 30.000 lobbyistes qui exercent une pression considérable pour que les réglementations de la Commission et du Parlement Européen (1) leur soient favorables.

Leur rôle est rendu un peu plus difficile qu’aux Etats-Unis parce que le système européen ne permet pas aux entreprises de faire des « dons » généreux aux élus et de « soutenir » leurs campagnes électorales, ce qui exclut (en tout cas officiellement) une certaine forme de corruption permise Outre-Atlantique. Mais ceci est largement compensé par la non-existence en Europe de certaines règles éthiques minimales, en permettant à des fonctionnaires d’utiliser leurs connexions dans les administrations publiques le lendemain du jour où ils les quittent. 

Officines politiques

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Pierre Pestieau

Tout lecteur assidu du Canard Enchaîné est familiarisé avec la réalité des officines, ces organisations poursuivant un but politique de manière secrète. Le journal satirique les a dénoncées à plusieurs reprises. Il en fut aussi la victime lors d’affaires demeurées célèbres. C’est surtout aux Etats Unis que ces organisations jouent un rôle dévastateur pour la démocratie. J’en donnerai deux exemples récents.

Il y a d’abord les officines qui ont noms « Freedom partners », « Generation opportunity », ou « Heritage » qui sont à l'origine des campagnes récentes contre l’Obamacare (1) et ont mené au blocage récent du gouvernement américain. Elles sont généreusement dotées par les frères Charles et David Koch, qui ont mis leur immense richesse au service de leur obsession : déstabiliser le socialiste Barack Obama. Depuis des mois, cette galaxie d’organisations a conçu, organisé et scénarisé la crise budgétaire qui a secoué l'Amérique. Elle a profité d'une concomitance exceptionnelle entre le vote de la loi de finance, l'entrée en vigueur de la loi sur l'assurance santé et la date butoir pour relever le plafond de la dette. Le chantage était simple : pas de vote du budget ni de déplafonnement de la dette sans report de l'Obamacare. Cette stratégie a momentanément échoué mais ce n’est que partie remise.

mercredi 6 novembre 2013

Tout fout l’camp

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Pierre Pestieau

Il m’arrive de m’étonner en lisant ça et là qu’une partie de la population qui vivait naguère dans l’ « enfer » soviétique et qui depuis plus de deux décennies connaît les joies du « paradis » capitaliste manifeste une certaine nostalgie pour le passé. Certes elle ne connaissait ni le luxe ni la liberté mais bien une certaine forme de sécurité.

Nous aussi dans notre vie quotidienne, nous sommes soumis à une série de contrôles et de comptabilisations qui nous font parfois regretter un monde sans doute moins efficient mais plus rassurant.

Cette réflexion m’est venue à l’esprit lorsqu’il y a peu je me suis aperçu que dans le centre de recherche où je travaille l’impression de documents nous était comptée nominalement et facturée en conséquence. Même réaction lorsqu’il a fallu payer pour les chèques bancaires émis, pour le parking au bureau, pour les immondices, … toute une série de biens ou de services qui paraissaient gratuits et que tout à coup on doit payer à l’unité. Quand quelqu’un s’en plaint, je tâche de lui expliquer qu’il est optimal de faire payer ces biens et services qui ont un coût réel et qui, jusqu'ici, était mal utilisés parce que gratuits. L’exemple typique est celui de ces chèques de quelques euros qui coûtent bien plus à l’institution bancaire. Ou encore le Mexique d’il y a 40 ans où les petits pains, que les Bruxellois appellent des pistolets, étaient quasiment gratuits et débordaient de certaines poubelles. Anticipant sur les prochaines années, un jour viendra où l’accès à l’internet et à SKYPE sera payant. On aura aussi à ce moment-là le sentiment de la perte d’un droit que l’on croyait acquis.

Les biblioburros, ou ânes porteurs de livres

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Victor Ginsburgh

Un article paru récemment dans la revue Science (1) fait état d’expériences relatives aux états mentaux qui rendent possible les relations sociales complexes caractérisant les sociétés humaines. Les auteurs montrent qu’il vaut beaucoup mieux lire des romans littéraires que des romans populaires ou de la non-fiction. Le roman littéraire mène à plus d’empathie, de perception sociale et d’intelligence émotionnelle que les autres genres.

L’article du New York Times (2) qui rapporte les résultats conclut en suggérant de lire plutôt Tchékhov ou Alice Munro (3) qu’une œuvre de qualité douteuse et vite faite (potboiler) de Danielle Steel, l’auteure américaine qui apparaît 31 fois entre 1984 et 2000 dans les listes annuelles des 10 ouvrages les plus vendus aux Etats-Unis. 

mercredi 30 octobre 2013

En lutte : Snowden, Assange et Manning, héros de notre temps

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Victor Ginsburgh

Je viens de lire Dark Tongues (1), un livre dans lequel Daniel Heller-Roazen, professeur de littérature comparée à Princeton traite des langues utilisées par ceux qui ne veulent pas être compris, gredins, voleurs, bandits, mendiants, et comme le dit si bien Michael V. Hayden, ancien directeur de la National Security Agency (NSA) et de la CIA « les nihilistes, anarchistes, activistes, LulzSec (2), anonymes, et les quelque vingt qui n’auraient pas parlé à des personnes du sexe opposé depuis cinq ou six ans » (3) en accusant Snowden, Assange et Manning, qui ont eu le courage de dénoncer les pratiques de surveillance et d’espionnage par la NSA de tout ce qui se dit et s’écrit, ainsi que de dévoiler les coups tordus de la diplomatie et des forces  armées américaines.

Points de vue

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Pierre Pestieau

Deux anecdotes qui laissent à penser. La première est récente. Je rencontre tout à fait par hasard une connaissance que je n’avais pas vue depuis plusieurs années. Je savais qu’elle travaillait pour la poste. Elle m’explique que l’entreprise va à vau-l’eau. Comme elle, de nombreux employés qualifiés sont mis au rencart alors que la poste en engage de nouveaux sous des contrats plus ou mois temporaires. La raison invoquée: ces employés, employés pour ne plus rien faire, n’auraient pas la motivation correspondant au projet de l’entreprise.

jeudi 24 octobre 2013

Manque d’effectifs ou manque d’effectivité ?

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Pierre Pestieau

Dans deux domaines stratégiques de nos états providence, on entend souvent parler de manque d’effectifs. Dans le domaine de la santé, on parle de déserts médicaux et dans celui de l’enseignement, de classes surnuméraires. Et pourtant que ce soit en France ou en Belgique, il y a selon les standards internationaux suffisamment de médecins et suffisamment de professeurs dans le secondaire. D’où vient le problème ? Simple comme l’œuf de Colomb. L’Etat qui finance les deux systèmes, la santé et l’éducation, ne se donne pas les moyens d’assurer une juste répartition des moyens sur le territoire entre les spécialités médicales ou entre les enseignements.

mardi 22 octobre 2013

Il n’y a rien de nouveau sous le soleil, dit la parole de l’Ecclésiaste

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Victor Ginsburgh


Machine à créer des entreprises, brevet administration wallonne
En juillet 2012, L’Echo publiait une ravissante image sur laquelle je m’étais basé pour écrire un blog intitulé « L’usine à gaz des outils économiques wallons » (1). Et j’y avais joint l’image d’une tuyauterie que je replace ici par une mécanique qui fera preuve, tout aussi bien que la première, de l’inventivité de l’administration wallonne.

 En mai 2013, soit dix mois après, l’Echo (2) revient à la charge avec les résultats d’une étude réalisée par Ipsos à la demande de l’Agence de stimulation économique — tiens celle-là je n’en avais jamais entendu parler et elle n’apparaît pas dans l’ancienne tuyauterie.

jeudi 17 octobre 2013

A propos de choses que je préférerais ne pas lire ni dire

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Victor Ginsburgh
Gas the Arabs (Jewish Defense League)

Voilà des choses que je préférerais ne pas lire. Mais une fois lues, il m’est difficile de les taire : Israël est un pays raciste. Ce n’est pas moi qui le dis, ce sont des journalistes israéliens de Haaretz auxquels je fais entière confiance.

Le racisme qui est cultivé en Israël, ironise Zvi Ba’rel dans Haaretz (1), est un bon racisme et l’auteur en donne quelques exemples:


« Le principal rabbin de Safed presse les habitants de la ville de ne pas louer aux Arabes. Est-ce horrible ? Mais non, ce rabbin est une exception. La Knesset (Parlement) est en train de préparer une loi qui devrait empêcher les Arabes israéliens d’être élus. Ce n’est pas vraiment du racisme, cela pourrait arriver aux Juifs aussi. Deux banques israéliennes (Hapaolim et Mizrahi-Tefahot) traitent de façon différente les Juifs et les Arabes. Pas grave, la Commission des Affaires Economiques du Parlement a décidé d’organiser une séance d’information... Bien sûr, aucun Juif ne veut être raciste, mais il n’y a pas de choix, c’est eux ou nous. Et puis, notre racisme est plus juste, plus égalitaire ; c’est un racisme qui pourrait servir de phare aux autres nations, d’exemple pour le reste du monde ».

lundi 14 octobre 2013

Crime contre l’humanité

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Pierre Pestieau

Il y a près de 2 ans, sept toiles de maître étaient volées dans
un célèbre musée hollandais. Parmi ces toiles, il y avait un Picasso et un Gauguin ; le montant du vol était évalué à 100 millions d’euros. Récemment, une Roumaine déclarait qu’elle avait brûlé ces toiles pour que l’on ne puisse pas incriminer son fils qui aurait participé à ce vol (1). Interrogé, le directeur du Musée d’Histoire Nationale de Bucarest, un certain Ernest Oberlander-Tarnoveanu, déclarait que si cette destruction était avérée, ce serait un « crime barbare contre l’humanité». Cette expression de crime contre l’humanité me semble souvent galvaudée pour des causes certes justes et nobles, mais qui ne méritent pas l’émoi que devrait susciter le massacre collectif de populations civiles, que ce soit au Cambodge, au Congo ou en Bosnie.

jeudi 10 octobre 2013

Le bon âge pour mourir

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Pierre Pestieau

Mathusalem
Apres avoir traité dans un blog précédent du bel âge pour vivre, intéressons nous  à l’idée d’un bon âge pour mourir. Existe-t-il un tel âge? En voila une question bizarre et pourtant. Pour toute personne raisonnable, aussi longtemps que la vie vaut la peine d’être vécue, pourquoi s’arrêter? Le « vaut la peine » est important ; il implique un certain niveau d’aisance matérielle, de santé et de sociabilité, les trois clefs du bonheur selon les spécialistes.

Il faut se garder de la malédiction de la vie éternelle. Témoin cette vieille légende d’un homme méritant auquel Dieu accorde la vie éternelle pour le récompenser de toutes ses bonnes actions. Apres de nombreuses années, il a perdu ses amis, enterré ses enfants et petits enfants, ne comprend plus le monde, et il implore Dieu de lui reprendre la vie. Ce que Dieu refuse. Mais ce n’est qu’un point de vue, le plus important certes, celui du mort potentiel. Il y en a d’autres. Celui de ses enfants ou celui de ses biographes et admirateurs.

A ceux qui n'ont pas le choix : Peine de mort aux Amériques

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Victor Ginsburgh

Les Etats (américains) dans lesquels continue d’exister la peine de mort — rassurez-vous, il n’y en a plus que 32 sur 50, quel progrès (1) — sont en panique : le Texas, l’Ohio, l’Arkansas et quelques autres ne parviennent plus à se procurer le triple cocktail (thiopental de sodium, bromure de pancuronium et chlorure de potassium, avis aux amateurs) qui permet d’exécuter les « criminels », et se demandent comment ils vont pouvoir continuer. La plupart des exécutions sont dès lors remises de jour en jour et le processus s’est enrayé, explique le New York Times (2). La Cour Suprême du Missouri vient heureusement d’autoriser le propofol. Rappelez-vous l’effet que ce produit a fait au pauvre Michael Jackson, donc cela semble en effet fonctionner pas trop mal. 

mercredi 2 octobre 2013

Netanyahou en pyjama de guerre

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Victor Ginsburgh

J’aurais bien dit tout nu, mais il ne se laisse pas photographier de la sorte, et puis je ne suis pas sûr que le spectacle nous ravirait.

Dans un article mi-figue mi-raisin (1), parce que la plaisanterie n’est qu’apparente, voici ce que pense Uri Avnery, le journaliste pacifiste de gauche israélien.

Mahmoud Ahamadinejad, l’ancien président iranien, dit-il, n’était en fait qu’un agent secret du Mossad, le service de sécurité israélien. Et c’est pour le cacher qu’il niait la Shoah, qu’il voulait la disparition, non pas de l’Etat d’Israël, comme on n’a pas arrêté de le dire, mais de l’Etat sioniste, tout en proclamant qu’il ne cesserait pas d’enrichir l’uranium, mais n’irait pas jusqu’à la ligne rouge, c’est-à-dire à la bombe, telle que brandie par Netanyahou lors de l’Assemblée Générale des Nations Unies en 2012.

mardi 1 octobre 2013

Le sport est-il raciste ?

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Pierre Pestieau

C’est là une formule lapidaire. Plus explicitement, je dirais que la pratique du sport n’est ni de droite ni de gauche mais que la plupart des organisations sportives sont de droite et souvent racistes. Les exemples sont nombreux. Je me contenterai de citer ceux qui m’ont le plus frappé.

jeudi 26 septembre 2013

Les deux, mon général

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Pierre Pestieau

A la question « Vaut-il mieux être bien soigné ou avoir l’impression d’être bien soigné? », on ne peut que répondre: les deux, mon général (1). Mais supposons que cela ne soit pas possible. Cette réflexion m’est venue en lisant un article (2) qui sera présenté à l’occasion du prochain congrès des Economistes Belges de Langue Française (excusez du peu). Les auteurs nous révèlent que les Belges sont, parmi les Européens, ceux qui sont les plus satisfaits de leur assurance maladie invalidité mais que tout à la fois, objectivement, cette assurance présente une série de lacunes graves. Par exemple, la part des soins non remboursés est plus élevée que chez nos voisins et les reports ou annulations de soins de santé pour raison financière sont en hausse.

mardi 24 septembre 2013

Rentrée littéraire : Oh les beaux jours

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Victor Ginsburgh (1)

Oh les beaux jours, comme disait Beckett (1). Oh, parce que les jours à venir n’étaient pas aussi beaux
que ce qui est suggéré par le titre. En effet, le Beaujolais nouveau est là, imbuvable comme d’habitude et la rentrée littéraire aussi. Personne n’a, mieux que Julien Gracq, décrit « ce spectacle turlupinesque : des jockeys de Grand Prix en train de chevaucher des limaces ».

Je propose de changer ces mauvaises habitudes et de donner les prix les plus prestigieux (je sais ils le sont tous, donc les choix sont difficiles) aux grands écrivains suivants (ils le sont aussi tous, et c’est tout aussi difficile):

mercredi 18 septembre 2013

La Pompei du désert syrien

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Victor Ginsburgh

Je viens de lire un article (1) qui relate la chute du fort romain dénommé « la Pompei du désert syrien » du côté de Dura Europos (en Mésopotamie, aujourd’hui en Syrie) en 256 de notre ère (2). On y a trouvé 19 tombes de Romains qui ne sont pas morts par le glaive ou le feu mais ont été gazés par des attaquants Sassanides.

lundi 16 septembre 2013

Riches et pauvres

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Pierre Pestieau

Les journaux ont une fâcheuse tendance à publier côte à côte des nouvelles qui semblent se contredire (1). C’était le cas du Soir (6 août 2013) qui présentait sans lien deux articles respectivement intitulés: « La moitié des Belges est incapable d’épargner » et « 245 milliards: nouveau record sur les comptes d’épargne en Belgique ». Le premier titre était complété par un sous-titre :

« Seuls 48% des ménages belges disent être en mesure de mettre de l’argent de côté, selon un sondage de la Banque centrale européenne »,

et le second par

« Les Belges continuent plus que jamais à épargner: ils ont placé un total de 245,51 milliards d’euros sur les comptes d’épargne réglementés en juin 2013. Un montant record mais qui reste dans la lignée d'une augmentation quasi ininterrompue depuis 2008 ».

dimanche 8 septembre 2013

Le bel âge

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Pierre Pestieau

« Je ne laisserai personne dire que c'est le plus bel âge de la vie ». Cette célèbre phrase de Paul Nizan était précédée de « J’avais 20 ans » (1). A la suite de nombreuses études et d’articles de tout genre consacrés au nouvel âge d’or que serait celui des septuagénaires, je serais plutôt tenté d’écrire « J’avais 70 ans et ne laisserai personne dire… ». Deux exemples de cet engouement pour les 70 ans. D’abord dans un article récent, Le Monde (9 juillet 2013) commente une enquête de l'Observatoire de la révolution de l'âge réalisée par ViaVoice. Selon cette enquête ; 89 % des personnes ayant 70 ans et plus se déclarent « heureuses ». Parmi elles, 37 % se disent « très heureuses ».

La vieillesse est perçue comme le temps de la liberté. Spontanément, une personne sur dix  définit ce qu'est d'être âgé par le fait de profiter de la vie, en fournissant, par exemple, ces réponses : « pouvoir faire ce que l'on veut, avoir les moyens de profiter de la vie » ou encore « être libre de se déplacer et de voyager ».
Dans ce troisième âge, 44 % déclarent apprécier avoir du temps à consacrer à leur famille et à leurs proches, et 38 % avoir du temps pour leurs activités de loisirs, culturelles ou associatives. Car pour eux, la vieillesse est à séparer du grand âge. Etre âgé, c'est surtout, pour près d'une personne sur deux, « un sentiment de déclin » physique ou moral. Et l'on devient vraiment âgé lorsqu'on « cesse d’être  autonome dans son logement ».

La circulation à Bruxelles : On a gagné

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Victor Ginsburgh

Enfin, Bruxelles a fait mieux que Paris. Tous les indicateurs (et les journaux) rapportent que la Belgique est « championne d’Europe des embouteillages » (1) et que Bruxelles est en tête du classement des villes, bien mieux que Paris, Londres, Milan et Los Angeles.

Nos ingénieux ingénieurs (pour parler comme Boris Vian) ont donc réussi là où les Français ont raté. Décidément, la décadence et la désindustrialisation françaises semblent réelles. D’ailleurs j’entendais, l’autre jour, une rédactrice du Larousse dire « j’eSSplique » et « eXetara », preuve qu’elle parvenait à prononcer correctement le X, mais pas au bon endroit.

jeudi 5 septembre 2013

Le rat des villes et le rat des champs

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Victor Ginsburgh

Puisque mon collègue blogueur fait référence à des fables dans son blog, je m’y mets aussi. Voici, celle du rat des villes et du rat des champs de La Fontaine :

Autrefois le rat des villes
Invita le rat des champs,
D'une façon fort civile,
A des reliefs d'ortolans.

Mais la ville est peu pratique, la dinette s’est trouvée interrompue par des gêneurs et le lendemain le rat des champs invitait son homonyme des villes:  

- C'est assez, dit le rustique ;
Demain vous viendrez chez moi.
Ce n'est pas que je me pique
De tous vos festins de roi ;

Mais rien ne vient m’interrompre :
Je mange tout à loisir.
Adieu donc. Fi du plaisir
Que la crainte peut corrompre!

Hélas, depuis le temps de La Fontaine, les champs sont devenus des villes.

L’économiste qui criait au loup

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Pierre Pestieau

L’expression « crier au loup » vient d’une fable d’Ésope dont le titre a été traduit en français par « Le garçon qui criait au loup ». Dans cette fable un garçon s’amuse à prétendre qu’il a vu un loup, ce qui le discrédite auprès des habitants de son village. Le jour où il voit vraiment un loup, personne ne prête attention à son cri d’alarme.

La fable m’est venue à l’esprit cet été en lisant l’ouvrage que Larry Kotlikoff et Scott Burns (1) viennent de consacrer au conflit des générations. Dans cet ouvrage, les auteurs reviennent sur l’idée selon laquelle la dette publique que l’Amérique connaît ne représente qu’une infime fraction de l’endettement que la génération présente a contracté vis-à-vis des générations futures. Si l’on considère l’ensemble des engagements pris, la dette réelle, ce qu’ils appellent le fiscal gap, se monterait à un montant 20 fois plus élevé que la dette traditionnelle, soit 15 fois le PIB. Cette dette au sens large inclut principalement la promesse de fournir des soins de santé au plus 65 ans (Medicare), aux plus démunis (Medicaid) et de procurer aux personnes âgées une retraite raisonnable (Social Security), promesse qui ne serait pas accompagnée par un engagement crédible de financement.

jeudi 29 août 2013

Charité et pédophilie

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Pierre Pestieau

Don Camillo
La « freakonomics » (issu de freak = saugrenu + economics = économie) utilise des concepts économiques d'un point de vue anticonformiste : elle n'hésite pas à bousculer les idées conventionnelles. En argot, freaky veut dire effrayant, et la freakonomics est aussi parfois effrayante. Les tenants de cette approche amassent de grandes quantités de données pour répondre à des questions simples mais intéressantes, du style : « Étant donné que la plupart des dealers habitent chez leur mère, la vente de cocaïne rapporte-t-elle vraiment plus qu'un boulot chez McDonald's ? »

Frédéric et les trois rois mages

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Victor Ginsburgh

Dans mon blog du 25 octobre 2012 qui suivait les élections belges du 14 octobre, j’écrivais :
Les trois rois mages

Aurais-je dû voter pour Frédéric Daerden, le bourgmestre socialiste de Herstal (1), magouilleur magouillant avec son père, également politicien de haut vol. Voici ce que dit le site Wikipedia quand on clique sur le site de Frédéric (2) : « La société [dont le père lui a cédé les rênes] a des contrats avec une trentaine d’intercommunales wallonnes dont dix-neuf ont leur siège social à Liège [notez que la commune où Daerden est bourgmestre fait partie du ‘Grand Liège’]. Le bureau audite les comptes de dix-sept sociétés de logements sociaux dont quinze sont situés en province de Liège, notamment la société du logement du plateau d’Ans », commune dont Michel Daerden, le père, a été bourgmestre de 1993 à 2011.

J’ai consulté le site Wikipedia de Fred le 11 août 2013, et malgré le décès de son père Michel en octobre 2012, ces phrases y figurent toujours. Et c’est très bien ainsi, les hommes meurent, mais leur passé ne peut pas être modifié, encore que…

mardi 27 août 2013

Il n’y a pas de petits larcins, il n’y a que des grands banquiers

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Victor Ginsburgh

Jacob Frenkel, un célèbre économiste, docteur en sciences économiques de l’Université de Chicago, auteur d’un très grand nombre d’articles en théorie macroéconomique et monétaire (1), actuellement Président de la JPMorgan Chase International et avant cela Vice-Président de l’American International Group (AIG) et Président de Merril Lynch International, membre de l’Académie Américaine des Arts et Sciences, titulaire de nombreux prix, dont le Prix Israël en Economie, s’est vu pincer il y a quelques années (en 2006) à l’aéroport de Hong Kong parce qu’il était sorti d’une boutique de luxe en tenant dans la main, une valise qualifiée de chère, qu’il avait « omis » de payer.

Janet et Larry

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Pierre Pestieau

Dans quelques mois le gouverneur de la Banque Centrale Américaine, Ben Bernanke, achèvera son second mandat et quittera selon toute vraisemblance son poste. Avec un président démocrate, on aurait pu s’attendre à ce que la place revienne à la vice-gouverneure actuelle, Janet Yellen, connue pour être du centre gauche, une position que les que les Américains qualifient de « libérale ». Janet Yellen est par ailleurs une macroéconomiste de renom, professeure à Berkeley. Et patatras, on apprend qu’Obama tente d’imposer son favori à la Fed, à savoir le trop fameux Larry Summers (1), un de ces économistes qui avaient été épinglés dans le film Inside Job (2) pour ses rapports trop étroits avec le monde de la finance, Goldman Sachs et Wall Street. Lui aussi est démocrate, mais un démocrate affairiste. Durant les quelques années pendant lesquelles il n’a pas travaillé pour le gouvernement, il a réussi à amasser une fortune qui lui permettrait dès à présent de prendre une retraite, ce qui serait à mon sens la meilleure décision qu’il puisse prendre. En un an, ses conférences lui auraient rapporté plus de 1,5 millions de dollars. Chez lui la parole est d’or. 

jeudi 27 juin 2013

Shimon Peres ou Quand les Dieux se marrent

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Uri Avnery, écrivain et journaliste israélien

Membre de la Knesset (Parlement israélien) de 1965 à 1973 et de 1979 à 1981, Uri Avnery est surtout connu comme militant des droits des palestiniens et pacifiste convaincu. Il appartient à une tendance de la gauche radicale israélienne et se définit comme post sioniste En 1982, il rencontre publiquement Yasser Arafat en vue de discuter d'une résolution du conflit. Il écrit régulièrement dans la presse israélienne et internationale. Voici ce qu’il écrit sur Shimon Peres, actuel Président de l’Etat d’Israël.

Si la vie de Peres était une pièce de théâtre comment faudrait-il la qualifier : de tragédie, de comédie ou de tragi-comédie? Pendant 60 ans, elle a ressemblé à la malédiction que les Dieux avaient imposée à Sisyphe : il devait pousser au sommet d’une montagne un rocher immense, qui retombait dans la vallée dès qu’il atteignait le sommet.

mercredi 26 juin 2013

Un mot malheureux

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Pierre Pestieau

Dans La Plaisanterie de Milan Kundera (1967) ou dans La Tache de Philip Roth (2000), un mot malheureux entraîne le héros dans une véritable descente aux enfers. Il a beau expliquer qu’il ne voulait pas dire ce qu’on a cru qu’il avait dit. Ç’est inutile. Au contraire ça l’enfonce davantage dans un cauchemar à la Kafka. C’est ce que montrent ces deux remarquables romans. C’est à eux que j’ai pensé quand j’ai reçu un courrier me reprochant d’avoir utilisé dans un petit ouvrage publié récemment avec Mathieu Lefebvre (1) une phrase qui témoignerait d’opinions et d’attitudes misogynes. Cette phrase donnée hors contexte se lit :

« Très longtemps, la famille était le vecteur de protection sociale le plus efficace. Elle l'est de moins en moins pour diverses raisons. La mobilité géographique, le travail des femmes, la nucléarisation de la famille, tout cela contribue à une certaine déliquescence de la solidarité familiale. »

Ma surprise fut grande parce que j’utilise souvent cette expression dans mes travaux sur la dépendance. On sait que l’augmentation de la longévité, entraîne une augmentation des besoins de soins à la dépendance. Ils devraient plus que doubler d’ici à 2050. Or la principale source de soins à la dépendance est la famille et dans la famille la grosse majorité de ce que l’on appelle les « aidants naturels » sont les femmes, les filles et les épouses ; les fils et les maris sont on ne peut plus « discrets ». On observe par ailleurs que la participation croissante et prolongée des femmes dans le marché du travail réduit le temps disponible aux tâches de soins, soins aux enfants, soins aux parents souffrant de perte d’autonomie. On remarque enfin que même si elles sont engagées dans le marché du travail, les femmes souffrent d’une « double peine » : elles continuent de s’occuper de leur foyer et d’assurer ces soins à la dépendance, mais la contrainte de temps limite leur disponibilité. Il existe d’ailleurs des études empiriques indiquant qu’une des raisons pour lesquelles certaines femmes prennent une retraite anticipée est l’apparition d’un phénomène de dépendance dans la famille, cette décision étant d’autant plus fréquente que leur salaire est faible et le coût marchand de la dépendance élevé.

Très souvent dans ces mêmes travaux, j’ai insisté sur les coûts psychologiques et physiques qu’entraînaient ces activités de soins et sur le fait que de nombreuses femmes sont souvent plus contraintes que volontaires quand il s’agit de les assurer. J’ai introduit à l’occasion le concept d’altruisme contraint fondé sur un norme familiale et non sur le libre arbitre. Ces coûts encourus par les aidants naturels sont d’autant plus élevés que l’aide est combinée avec un travail professionnel ou que l’aide n’est pas vraiment volontaire.

J’ai consacré plusieurs travaux à défendre le développement d’une véritable assurance sociale de la dépendance, ce que les Français ont appelés le cinquième risque, pour éviter que ces situations d’aide contrainte ne se multiplient. En permettant l’institutionnalisation de parents lourdement dépendants on évite à de nombreuses femmes de s’épuiser à la tâche et de perdre elle-même la santé. On a pu ainsi montrer que les coûts indirects de la dépendance, encourus par les aidants naturels, sont aussi élevés que les coûts directs, qu’entraîne la prise en charge des personnes dépendantes. Ce n’est pas par hasard que l’on observe depuis quelques années un léger déclin de la longévité en bonne santé chez les femmes qui continuent vivre de plus en plus longtemps.

Sans doute devrais-je dépasser le stade descriptif et déplorer le monde dans lequel nous vivons. Les hommes ont réduit leur participation au marché du travail et n’ont pas pris dans le ménage la place des femmes en devenant eux aussi « des aidants naturels ». En touchant des revenus supérieurs à ceux des femmes, ils ont beau jeu de demander à ces dernières d’arrêter de travailler pour s’occuper de parents dépendants au nom d’une saine économie domestique. Dois-je chaque fois me réjouir de cette participation accrue des femmes dans le marché du travail, participation qui leur permet d’échapper à cet altruisme forcé auquel il a été fait allusion ?

En conséquence, il me faudra à l’avenir faire une note de bas page aussi longue que ce blog dès que j’observe que les femmes travaillant de plus en plus et de plus en plus tard, on peut craindre que la famille ne puisse plus jouer son rôle historique devant les besoins croissants d’aide à la dépendance. Une  chanson  à succès (2) nous disait : Etre une femme libérée tu sais c'est pas si facile. Je la paraphraserais en écrivant : Etre un homme féministe tu sais c'est pas si facile, c’est sans doute impossible.

(1) L’Etat-providence en Europe, Performance et dumping social, CEPREMAP, Paris, 2012.
(2) Femme Libérée est une chanson du groupe strasbourgeois Cookie Dingler écrite en 1984.

jeudi 20 juin 2013

That’s not my problem

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Victor Ginsburgh

En Australie, j’ai vu un koala qui me regardait en clignant de ses petits yeux, quatre ou cinq kangourous qui sautillaient sur leurs pattes arrière, comme n’importe quel kangourou, un aborigène qui avait une queue de cheval et des piques dans les cheveux et, dans l’avion de Virgin Airlines qui me ramenait d’Adelaïde à Sydney, à quelques rangées devant moi, une vieille dame avec une petite valise qui demandait au steward de l’aider à la mettre dans le compartiment au-dessus de son siège. Le réponse du steward a été immédiate et fait le titre de mon blog : « That’s not my problem, I am not paid to do that » (1).

Well, c’est à peu près ce que me répondrait sans doute un(e) jeune si je lui demandais de me céder sa place assise dans le tram ou le métro, quelle que soit la ville européenne. Et je pourrais sans doute me considérer heureux qu’il (peut-être elle aussi d’ailleurs) ne m’ait pas fait le signe habituel du majeur levé, les autres doigts repliés, que font les automobilistes en 4x4 lorsque vous leur faites remarquer qu’ils n’ont pas respecté la priorité qui vous revenait, ou qu’ils ont « oublié » de signaler qu’ils changeaient de direction. Voire le piéton, ou le vélo qui traverse au feu rouge alors que vous vous apprêtez à passer au feu qui, devenu vert, vous est favorable. Et pour autant qu’il en ait le temps.

On finit par s’y faire et parfois on se reprend à leur rendre un aimable signe de la main pour se remercier soi-même de leur avoir cédé la priorité. Mais je n’avais jamais entendu ou lu ce que raconte Jouannais (2), que j’ai déjà cité il y a peu, mais son humour est inépuisable. Voici une citation tirée de son chapitre intitulé les Moi-Je :

«  Il existe, en région parisienne, deux stations-service équipées de jets de salissage. Il s’agit de dispositifs du genre Karcher destinés non pas à nettoyer les carrosseries, mais au contraire à les salir, en projetant de l’eau mêlée de boue synthétique. Les clients en sont des cadres dynamiques et très urbains, possesseurs de véhicules tout-terrain. Ces 4x4 sont bien évidemment conçus pour participer à des rallyes africains, et ne se trouvent aucunement adaptés à quelques petits trajets quotidiens entre la place de la Concorde et Neuilly. Aussi, autant pour justifier l’utilisation de tels véhicules—lesquels sont parfois équipés de pelles de désensablement et de jerrycans de sécurité—que pour éviter la honte du bluff le plus grotesque, les conducteurs en question font-ils salir leur véhicule d’aventurier pour faire comme si… Comme si, en effet, ils risquaient leur vie chaque week-end dans le désert du Néguev. L’art du Moi-Je, qui nous invite à d’émouvantes croisières dans les entrailles de nos créateurs, superposant la psyché de l’artiste et le cosmos, s’apparente assez à cette technique de salissage automatique ».

Tout compte fait, il est vrai qu’à Bruxelles, la place Stéphanie et le goulet de l’avenue Louise sont pleins de ces 4x4 vides et garés en double file, ce qui me porte à croire qu’il doit y avoir dans les parages une station de salissure et que leurs conducteurs et conductrices y attendent leur tour en prêtant leur chevelure à un brushing quotidien bien mérité. C’est décoiffant.


(1) « Ce n’est pas mon problème, je ne suis pas payé pour faire cela ».
(2) Jean-Yves Jouannais, Artistes sans œuvres, I would prefer not to, Paris : Editions Verticales/Phase Deux, 2009.