mercredi 15 avril 2020

Trois brèves réflexions sur le covid-19


Pierre Pestieau

Plus jamais ça ! Chiche

On n’a pas encore atteint le pic de la pandémie et le bout du tunnel est peut-être encore loin, mais nombreux sont déjà les beaux esprits qui glosent à propos de ce qui se passera une fois tournée la page de la pandémie. On entend des propos qui rappellent le « plus jamais ça » qui à suivi la seconde guerre mondiale et la découverte du génocide. On parle de changement de paradigme, de révolution des comportements, de l’apparition d’un homme nouveau. Or on sait ce qui est advenu des bonnes résolutions de l’après-guerre. On a connu d’autres génocides et certains pays sont victimes de la peste brune (1).


Le livre noir du covid-19

Il est bien sûr impossible de dire à combien s’élèvera le tribut que nous devrons payer au covid-19. A ce jour on dénombre quelque 120.000 morts (2). Il est intéressant de contraster ce chiffre avec celui que l’on attribue au changement climatique, qui lui s’élève à plusieurs millions. Or la réaction des gouvernements et celle de la population à l’urgence climatique est beaucoup plus passive que ce qu’on observe aujourd’hui, face à l’urgence pandémique. Pourquoi cette différence ? Sans doute est-elle due au fait que chacun se sent menacé par le covid-19 alors qu’il croit pouvoir échapper aux risques du changement climatique. 

On peut espérer que la relance de l’économie, qui sera indispensable une fois la pandémie terminée, ne se fera pas au détriment de l’environnement comme ce fut le cas après la crise de 2008. Les plans massifs de soutien à l’activité économique avaient conduit à une forte hausse des émissions de CO2. Il faut souhaiter que cette fois-ci les politiques de relance puissent contribuer à la transition énergétique. 

Économie de guerre

Partout on entend des critiques sévères des systèmes de santé belge et français. On leur reproche leur imprévoyance. L’ex-ministre de la santé en France, Roselyne Bachelot, a été vertement moquée pour avoir commandé, en juillet 2009, 94 millions de vaccins afin de faire face à la pandémie annoncée de grippe H1N1. Cette grippe s’est finalement révélée moins grave que prévu. Les Français n’ont été que 6 millions à se faire vacciner, ce qui laissait le pays avec un stock de 88 millions sur les bras, ou plutôt sur ceux de l’État français. Aujourd’hui, elle a beau jeu de se pavaner avec un « j’avais raison avant l’heure » qui ne tient pas la route. 

On notera que les pays qui ont réussi à maîtriser la pandémie du covid-19 ne sont pas connus pour avoir un système de santé performant et généreux, certainement moins que ne le sont les systèmes de santé belge et français. En d’autres termes il faut distinguer le système de santé en temps de « paix » et la capacité d’un pays à faire face à une pandémie. Comme les exemples asiatiques le révèlent, cette capacité repose sur un pouvoir autoritaire et un esprit civique. Après le confinement, on ne pourra éviter de réformer notre système de santé et développer des outils qui permettent de réagir plus rapidement et plus efficacement aux risques inassurables, dont le covid-19 est un parfait exemple.

(1). Surnom donné pendant la Seconde Guerre mondiale au nazisme par analogie à la couleur des chemises des SS.
(2). Plus exactement 123.783 selon le site https://www.worldometers.info/coronavirus/ le 14 avril à 19h.



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