jeudi 23 janvier 2025

Famille : entre amour et déchirement

Pierre Pestieau


Il existe de nombreux facteurs qui peuvent affecter le bien-être des personnes âgées en fin de vie. Parmi eux, les enfants peuvent effectivement jouer un rôle crucial, qu’il soit positif ou négatif. Leur implication et leur comportement influencent profondément la qualité de vie et l’état émotionnel des aînés durant cette phase de vulnérabilité.

La présence attentive et affectueuse des enfants peut apaiser les angoisses et offrir un sentiment de réconfort. Leur amour et leur écoute aident à réduire la solitude et les troubles émotionnels tels que la dépression ou l’anxiété. Les enfants peuvent apporter une aide précieuse pour les soins quotidiens, tels que l’hygiène personnelle, la prise des repas, ou les déplacements, ce qui améliore la qualité de vie et le sentiment de dignité.

Les enfants peuvent aussi agir comme intermédiaires entre la personne âgée et les professionnels de santé, en veillant à ce que les traitements soient suivis et que les décisions médicales respectent les souhaits du parent. En rendant visite régulièrement ou en partageant des moments significatifs, les enfants permettent aux aînés de rester connectés à la vie familiale et sociale, ce qui a un impact positif sur leur bien-être global.

Cette vision positive, quasiment idyllique, est présente dans nos imaginaires. Elle ne se vérifie malheureusement pas dans tous les cas. Consciemment ou pas, les enfants peuvent gâcher les dernières années, les derniers mois de leurs parents. Certains enfants, par manque de temps, de ressources ou d’intérêt, peuvent négliger les besoins des aînés. Cette absence d’attention peut accentuer le sentiment d’abandon et aggraver leur état de santé. Pire encore, les tensions ou désaccords entre enfants au sujet des soins ou des questions financières peuvent créer un environnement stressant, affectant négativement le bien-être de la personne âgée. Dans certains cas extrêmes, des comportements abusifs, qu’ils soient verbaux, émotionnels ou physiques, peuvent profondément nuire à la dignité et à la santé des personnes âgées.



Un exemple d’abus trop souvent répandu est l’insistance des enfant à placer leur père ou leur mère dans un Ehpad à bas coût afin de préserver un héritage sur lequel ils comptent avidement. Ils toucheront d’autant plus vite cet héritage que ce placement dans un mouroir risque de raccourcir davantage la vie de leur parent. Autre exemple, refuser à un parent souffrant une euthanasie pourtant réclamée au nom de principes religieux. Enfin, on citera le refus de la famille proche d’autoriser les visites d’amis de la personne en fin de vie.

Je recommande sur ce triste sujet le récent roman de Lionel Shriver (1) qui narre avec un humour grinçant l'histoire d’un couple qui considère mutuellement que leur vie n’en vaut plus la peine, sauf que leurs enfants en décident autrement.

Cerise sur le gâteau, la personne qui subit de telles maltraitances a tendance à se sentir coupable de ne pas avoir donné à ses enfants les bonnes valeurs. Ce qui accroit son désarroi.

En résumé, le rôle des enfants est déterminant pour le bien-être des personnes âgées en fin de vie. Une approche basée sur l’empathie, la communication et la collaboration est essentielle pour maximiser les impacts positifs. Si les enfants ne jouent pas ce rôle, il existe peu de recours. L’outil législatif est le plus souvent impuissant. La mise sous tutelle, par exemple, ne permet pas d’éviter ce qui relève de la maltraitance. Il est bien sûr évident que ces deux types de comportement, aimant et abusif, sont extrêmes. La réalité se situe le plus souvent entre les deux.




(1) Lionel Shriver, "À prendre ou à laisser" Belfond, Paris 2023.

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