samedi 28 mai 2011

Politique culturelle, à la …

Victor Ginsburgh

Durant la semaine où la Belgique se passionnait parce que le Standard avait battu Anderlecht et se demandait si le club pourra décrocher le titre de je ne sais trop quoi, une des plus importantes collections belges d’art conceptuel et minimal de la deuxième moitié du 20e siècle – des œuvres acquises par Nicole et Herman Daled entre 1966 et 1978 à des artistes vivants – s’en allait au Museum of Modern Arts (MoMa) à New York. Plus de 80 œuvres de Marcel Broodthaers, mais aussi des œuvres de (et des documents uniques sur) Carl André, Sol LeWitt, On Kawara, Dennis Oppenheim, Jorg Immendorf, Robert Ryman, Richard Long, Gilbert and George, Dan Graham, Hanne Darboven, Niele Toroni, plusieurs Daniel Buren, et j’en passe.

Cette collection a été exposée au Haus der Kunst à Munich en 2010. Aucun responsable des nombreux ministères de la culture que compte la Belgique n’a fait le déplacement. Par manque de jet privé ? Deux conservateurs de musées belges seulement ont pris le temps de faire un saut à Munich. Par manque d’intérêt de la part des autres, ou pire, par ignorance ? Les responsables du MoMa, eux, sont venus la voir depuis New York. Et ceci a entrainé cela. L’Etat belge a raté la collection.

Information qui semble d’ailleurs cohérente avec le fait que le Musée d’Art Moderne de Bruxelles ferme ses portes pour, selon certains critiques, et pour autant que ce soit vrai, faire la place belle à l’art du 19e siècle et « occulter » celui des 20e et 21e siècles.

De manquement en manquement des pouvoirs publics, on se rappellera ce qui s’est passé il y a peu autour du Palais Stoclet, ce chef-d’œuvre de l’Art Nouveau de l’architecte Hoffmann. Comme le notait Le Monde à l’époque (1), « le morcellement des compétences politiques dans la Belgique fédérale et le peu d'empressement des pouvoirs publics à assurer la défense des biens culturels laissent peu d'espoir à ceux qui veulent éviter la catastrophe ». Et la saga n’est pas finie, note Guy Duplat dans La Libre (2).

Ou encore des péripéties autour de la collection d’art précolombien que Dora Janssen proposait de donner au Musée du Cinquantenaire en paiement des 8 millions d’euros de droits de succession suite au décès de son conjoint. Ces droits reviennent à la Flandre, qui refuse la dation après plusieurs années de discussion. La raison : le musée du Cinquantenaire est situé à Bruxelles. La propriétaire prend des contacts avec un musée américain qui s’intéresse (évidemment) à la collection, ce qui résout finalement le gouvernement flamand à revenir sur sa décision et à accepter la dation (3). La collection a résidé pendant cinq ans au Cinquantenaire et vient d’être transférée au Museum Aan de Stroom à Anvers.

Ni, faut-il le rappeler, et ce malgré une pétition internationale signée par 700 architectes, la destruction en 1965 de la Maison du Peuple, avantageusement remplacée par le tour dite de Blaton. Après tout, Horta ou Blaton, c’est du pareil au même. Y a-t-il chez nous un ministre de la culture capable de reconnaître qui est qui ?

Quelle politique culturelle à la c…


(1) Jean-Pierre Stroobants, Menaces sur le Palais Stoclet, chef-d’œuvre bruxellois, Le Monde, 4 mars 2006.

(2) Voir Guy Duplat, La saga du palais Stoclet, La Libre, 27 juillet 2009,

http://www.lalibre.be/culture/politique/article/518493/la-saga-du-palais-stoclet.html

(3) Pour les détails, voir Guy Duplat, Collection Janssen : l’offre de Reynders, La Libre, 11 février 2006, http://www.lalibre.be/culture/politique/article/268180/collection-janssen-l-offre-de-reynders.html

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