dimanche 26 août 2018

Un inventaire des lâchetés de nos gouvernants
Pierre Pestieau

Il est généralement admis qu’avec la mondialisation, l’espace économique dépasse l’espace politique et que du coup nos gouvernants nationaux ont de moins en moins de pouvoir. C’est oublier trop facilement qu’il leur reste une marge de manœuvre importante qu’ils n’utilisent souvent pas. J’aimerais citer quelques exemples de politiques que nos gouvernements pourraient adopter mais auxquelles ils préfèrent le « laissez faire », par opportunisme ou faiblesse devant des groupes de pressions et autres lobbies.


Aide et soins

Qu’elle concerne la petite enfance, les personnes dépendantes ou les handicapés, l’aide et les soins que réclament ces différentes situations est en grande partie fournie par la famille. Ce qui arrange l’Etat qui se réfugie derrière l’idée que les proches fournissent cette aide avec altruisme et donc sans peine. C’est un peu facile, la majorité des parents qui renoncent à un emploi pour s’occuper de leur enfant en bas âge ou d’un enfant handicapé préfèreraient sans nul doute bénéficier d’une infrastructure publique qui leur permettrait de continuer une carrière professionnelle et d’être davantage disponible une fois rentrés à la maison. Même remarque pour les épouses ou les filles qui doivent s’occuper d’un mari ou de parents dépendants. Or on se rend de plus en plus compte que ce n’est pas l’altruisme mais la norme qui préside à l’entraide familiale et que cette aide qui n’est pas totalement volontaire à des coûts importants sur la santé des personnes aidantes. Dans l’entraide familiale, le rôle des femmes, mère, épouses et filles, est prédominant, ce qui est une preuve de plus que l’altruisme, qui ne devrait pas avoir de genre, n’en est pas le seul moteur.

Prévention

Dans le domaine de la santé, on distingue politiques préventives et curatives. Ces dernières représentent l’essentiel de dépenses de santé publiques ou privées. Or on sait que la prévention est souvent l’approche la plus efficace en termes de rapport amélioration de la santé par euro dépensé. La prévention réclame du courage de la part des individus concernés mais aussi des pouvoirs publics qui doivent prendre des mesures impopulaires, en tout cas dans un premier temps, ou qui indisposent de puissants lobbies. Un bel exemple de cette situation est la difficulté d’interdire le glyphosate ou le diesel dont la nocivité est largement avérée. Nombreux sont ceux qui se disent écologistes et pour des raisons de convenance continuent de désherber leurs jardins avec du Roundup. Seule une interdiction crédible permettra de mettre fin à cette pratique dangereuse.

L’Etat, le PPP et privatisation

Suite à la vague de privatisations qui a commencé avec l’arrivée au pouvoir de Ronald Reagan et Margaret Thatcher, l’entreprise publique n’a plus la cote. Et cela, même là où elle aurait dû s’imposer, c’est à dire là où la notion de service public paraît centrale. Les gouvernements, tant de gauche que de droite, lui ont préféré le partenariat public-privé (PPP) qui semble avoir le vent en poupe. Le PPP représente la dernière évolution de la nouvelle gestion publique (new public management), l’aboutissement de l’idée selon laquelle les pouvoirs publics et les particuliers n’ont pas des intérêts opposés, mais qu’ils peuvent être au contraire partenaires dans la mise en œuvre de projets communs d’intérêt général.

Sur le papier l’idée est séduisante. Dans la réalité elle l’est beaucoup moins. Le partenaire privé exclusivement intéressé par les rentrées financières a le plus souvent éludé une partie de son cahier des charges, profitant de ce que les pouvoirs publics ne disposaient pas de l’information nécessaire pour exercer leur contrôle.

Voilà quelques exemples de domaines dans lesquels nos Etats nationaux ont une certaine marge de manœuvre. Visiblement, ils ne l’utilisent pas.



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