jeudi 23 septembre 2021

Talibans et Juifs

Victor Ginsburgh


Les Talibans seraient-ils des descendants d’une de tribus dites perdues d’Israël ? Ce n’est pas moi qui pose la question, mais Michael Freund (1), un activiste politique israélien qui s’intéresse aux individus qui se disent Juifs, y compris ceux qui descendent des dix tribus perdues d’Israël, et essaie de les aider à s’installer en Israël.

L’Afghanistan est depuis longtemps un mystère de l’histoire juive, écrit Freund. Il se pourrait que les tribus pachtounes, dont les Talibans font partie, soient une de ces tribus qui ont été exilées par l’Empire assyrien il y a quelque 2.700 ans.

Les quelques dix millions de Pachtounes qui vivent au Pakistan, en Afghanistan et en Inde et forment plusieurs centaines de tribus ou clans, ont fièrement préservé leur héritage. Avant la naissance du fondamentalisme islamique dans la région, certains de ces clans se considéraient depuis longtemps comme des Bani Israel (fils d’Israël en hébreu). Et bon nombre d’historiens européens qui ont visité la région, en étaient convaincus.

Dans Histoire des Afghans, Joseph-Pierre Ferrier (2) raconte qu’un des chefs d’une des tribus pachtounes, les Usefzai (fils de Joseph) a présenté au shah de Perse une bible écrite en hébreu et divers objets de leur ancien rite qu’ils avaient préservés. Plus récemment, dans son ouvrage sur des communautés juives lointaines, Yitzhak Ben-Zvi qui a été Président de l’État d’Israël de 1952 à 1963, souligne que dans des interviews qu’il a conduites parmi les Juifs Afghans qui avaient fait leur aliyah (retour en Israël, en hébreu), « les tribus afghanes, parmi lesquelles les Juifs ont vécu pendant des générations, sont des musulmans qui ont retenu les traditions de leur ascendance juive » (3). Tout en étant circonspect, il ajoute que « le fait que cette tradition a persisté doit être envisagé avec beaucoup de considération ».

L’historien israélien, Yal Be’eri spécialiste des Pachtounes a comparé certaines de leurs traditions aux traditions juives, en particulier, la circoncision au huitième jour après la naissance, l’interdiction de mélanger la viande et le lait, l’allumage des bougies la veille du Shabbat ou encore le lévirat, mariage où le frère d’un défunt épouse la veuve de son frère, afin de poursuivre la lignée du frère.

L’anthropologue israélienne Shalva Weil professeur à la Hebrew University Jerusalem considère que le lien entre Pachtounes et les tribus perdues d’Israël est particulièrement convaincant : « alors que les générations anciennes de Pachtounes ne cachaient pas leur ascendance juive, les générations plus récentes ont abandonné ce savoir à la lumière de la constellation politique actuelle » (4).

Étrange paradoxe. Après tout, pourquoi ne pas les autoriser à s’installer en Israël, plutôt qu’en Afghanistan ? Même s’ils ne sont pas Juifs, ils sont de fins guerriers…


(1). Michael Freund, Are the Talibans descendants of Israel?, The Jerusalem Post, Sptember 9, 2021.
(2). Joseph Pierre Ferrier, History of the Afghans, Blackwell Andesite Press, 2007.
(3). Itzhak Ben-Zvi, The Exiled and the Redeemed, Philadelphia : Jewish Publication Society of America,1957.
(4). Shalva Weil, The Israelite connections of the Taliban, AfricaNewsAnalysis, September 8, 2011.

1 commentaire:

  1. mmmouais. L'Israélien que je suis (aussi) n'est pas franchement enthousiasmé par la proposition.

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