jeudi 28 avril 2022

Trop d’hygiène nuit à la santé

Pierre Pestieau

Iconoclaste patenté, Ivan Illich défendait dans son ouvrage la Némésis Médicale paru en 1974 l’idée que la disparition des épidémies, la diminution de la mortalité infantile et de la morbidité et l'augmentation de l'espérance de vie doivent très peu à la médecine mais davantage à l’hygiène de vie et au régime alimentaire. La pandémie a d’ailleurs éloquemment révélé l’importance de l’hygiène et des gestes barrières.

Et pourtant, il existe aussi une théorie, qualifiée d’ hypothèse hygiéniste,  selon laquelle une réduction de l’exposition aux infections et aux composantes microbiennes dans les pays industrialisés entraînerait une diminution de la maturation du système immunitaire et, en conséquence, une augmentation de la prévalence des maladies allergiques, auto-immunes, inflammatoires ou de certains cancers (1). Ainsi donc,  le mode de vie aseptisé serait le facteur expliquant la recrudescence des maladies auto-immunes, les êtres humains développant une réponse immunitaire excessive.


On s’est en effet aperçu, depuis une quarantaine d'années, que la fréquence de ces maladies augmentait régulièrement. Cela est vrai pour le diabète insulinodépendant et la sclérose en plaques qui sont des maladies auto-immunes, ou encore, les maladies inflammatoires de l'intestin. C'est encore plus vrai pour les maladies allergiques de tout ordre : asthme, rhume des foins, eczéma du nourrisson, allergies alimentaires.

Dans cette même logique, certaines études ont démontré le rôle protecteur du mode de vie dit « rural », présentant des conditions particulières telles que la proximité d’animaux, un niveau d’hygiène moindre ou, à l’inverse, un risque accru lié à une trop grande médicalisation dès le plus jeune âge - une utilisation précoce d’antibiotiques éventuellement.

Ces observations que personne ne met en doute sont à rapprocher du fait que, pendant la même période, on a observé une diminution remarquable des grandes maladies infectieuses, même si certaines maladies émergentes comme le SIDA ou la COVID-19, sont apparues. La question s'est posée de savoir s'il existait une relation entre l'augmentation des maladies immunitaires et la diminution d'un grand nombre de maladies infectieuses.


Sans entrer dans ce débat de spécialistes, on a l’impression qu’il nous faudrait trouver un degré d’hygiène optimal qui ne serait pas nécessairement le degré maximal. Réduire les maladies infectieuses est certes louable, mais arrêter la croissance rapide des allergies, du diabète et de la sclérose en plaques l’est tout autant.


(1). Voir sur ce sujet Jean-François Bach (2021) Environnement et santé, Communication devant l’Académie des sciences morales et politiques, https://academiesciencesmoralesetpolitiques.fr/2021/01/12/jean-francois-bach-environnement-et-sante/


3 commentaires:

  1. Excellent Pierre ! Ta remarque sur le mode de vie rural me fait penser a l'étymologie du mot vaccin : la vache ! Voir ici : https://dictionnaire.orthodidacte.com/article/etymologie-vaccin

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  2. le mode de vie rural de nos jours dans nos pays n'est plus nécessairement celui décrit par Pierre... attention aux pesticides et autres produits nocifs

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  3. Je ne me lave plus pour vivre plus vieux? En fait il faut se protéger mais pas trop en effet. Pour le sexe je reste averse au risque, CARA ou CRRA.

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