samedi 18 juin 2011

Que la vie serait belle

Victor Ginsburgh

Le secrétaire d’Etat bruxellois de la mobilité et les bourgmestres de 18 communes bruxelloises, sont favorables à l’interdiction des « quads » (je ne sais pas trop ce que c’est). La raison avancée est qu’ils sont bruyants, construits pour un style de conduite sportive, ce qui en fait des engins ne favorisant pas la qualité de vie en ville (1).

On ne peut pas dire que c’est faux. Mais alors les motos devraient l’être également. Elles sont aussi bruyantes, aussi sportives et bien plus dangereuses que les quads qui ont au moins l’avantage des quatre roues.

Tant qu’à bannir les motos parce qu’elles n’ont que deux roues, il faudrait évidemment faire de même pour les vélos, qui ne font pas de bruit, mais quels dangers, à la fois pour ceux qui les utilisent, pour les piétons et pour les automobilistes. La plupart ne respectent aucune règle de conduite, roulent à contresens, sur les bandes réservées aux piétons, et j’en vois tous les jours qui brûlent très allègrement les feux rouges.

Il en va d’ailleurs de même pour les piétons qui, eux aussi, brûlent les feux rouges et se ruent sur les passages dits « pour piétons », sans se soucier le moins du monde si un véhicule est ou n’est pas engagé.

Et puis que fait-on des 4x4 dont nos rues, trottoirs, parkings et autres emplacements sont encombrés, parce que leurs conducteurs et -trices sont incapables de garer correctement, sans prendre deux à trois emplacements en longueur comme en largeur. Ils sont faits pour les déserts, y a qu’à voir les noms qu’ils portent, les pneus dont ils sont affublés, y compris le pneu arrière qui se trouve à l’extérieur parce que le véhicule est trop petit pour le mettre à l’intérieur. Faudrait aussi qu’ils portent sur leurs flancs des jerrycans pour le cas de panne d’essence en plein désert. Ben oui, qu’ils y aillent, dans les déserts d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient, ils seront bien plus proches des sources de pétrole. Quelle économie de transport!

Mais alors les Porsche, les Ferrari et autres voitures du genre devraient aussi être interdites. En cause la conduite sportive, mais quand même moins bruyante que celle des quads, et la consommation de carburant.

Ne parlons pas du scandale des camions avec remorque qui roulent partout et qui doivent négocier certains carrefours à angle droit en trois ou quatre fois, et empêchent ainsi les conducteurs de voitures ordinaires, comme la mienne, d’avancer.

Ce qui pourrait être évité s’il n’y avait plus de voitures ordinaires non plus.

Vous imaginez, une ville sans quads, sans vélos, sans piétons, sans Ferrari, sans 4x4, sans camions et sans voitures ordinaires. Plus que des tricycles et des trottinettes. La suppression des routes, des stations d’essence et des parkings, qui pourraient être remplacés par des espaces verts. Plus jamais de camions sur le flanc ou les quatre fers en l’air sur le ring. Plus d’embouteillages, on pourra venir par la E411, transformée en espace vert, sans être bloqué et perdre une heure entre Overijse et Bruxelles. Que la vie serait belle…

(1) RTBF, 10 juin 2011.

1 commentaire:

  1. Il semble que votre réflexion (quelque peu caustique) sous-entende le fait qu'habiter dans une ville implique que l'on ait une plus grande tolérance aux externalités créées par autrui. Je partage cette opinion. Néanmoins, à la différences des voitures, les quads sont utilisés par un nombre très restreint de personnes. Le désavantage (sans doute grand, je le reconnais) créé par cette éventuelle interdiction pour les conducteurs de quads n'est rien à côté de l'avantage (certes limité mais multiplié par un très grand nombre d'habitants) procuré au plus grand nombre. Or, il relève, selon moi, du rôle du politique de favoriser l'intérêt général, par rapport à l'intérêt particulier. Il est généralement difficile d'y parvenir car l'intérêt particulier a tendance, comme on le sait, à s'activer d'autant plus pour défendre son point de vue. Laissons donc les conducteurs de quads défendre leur pré-carré et ne blâmons pas nos politiques parce que, pour une fois, il songe à notre bien-être général.
    Bien cordialement,
    Laurent Hanseeuw

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